Grève de la faim symbolique ‘‘Massacre au Kurdistan, brisons le silence!’’

kurdes_alevis_GFSolidarité contre la sanglante répression exercée par le régime de l’AKP contre les Kurdes

Le Comité de la Jeunesse kurde de Liège a décidé, en collaboration avec le centre culturel alevi de Liège, d’entamer une grève de la faim ce vendredi jusque dimanche, en soutien aux populations kurdes du sud-est anatolien, dans l’Etat truc. La population kurde est victime d’une féroce répression où bombardements, massacres et viols se succèdent, dans un silence complice de la part de l’essentiel des médias et des politiciens occidentaux.

Cette situation dure maintenant depuis plusieurs mois, les estimations faisant état d’un demi-millier de morts parmi la population kurde, dont 150 ce mois-ci uniquement. Socialisme.be s’est rendu ce vendredi soir au centre culturel alevi de Liège où les grévistes de la faim et leurs partisans se reposaient après une journée passée sur la place Saint-Lambert, en plein centre-ville, pour sensibiliser les passants à la cause kurde.

GF_01Un groupe de militantes enthousiaste a de suite expliqué en détail la dramatique situation qui s’est développée à l’instigation du président Erdogan (AKP, Parti de la justice et du développement) et de son gouvernement depuis l’été 2015. Une cinquantaine de couvre-feux illégitimes ont été instaurés dans le sud-est anatolien, les habitations sont bombardées, l’approvisionnement en eau et nourriture est bloqué, les civils sont tués en toute impunité quel que soit leur âge. ‘‘Le président Erdogan, par l’intermédiaire de l’armée et la police a instauré un climat de terreur sans égal ! Pouvez-vous imaginer qu’un membre de votre famille se fasse tuer pour simple fait d’être Kurde ? Pouvez-vous imaginer que le corps de cette personne ne peut être allé rechercher par les membres de sa famille et ce, même si vous êtes muni d’un drapeau blanc ? Pouvez-vous imaginer que vous soyez contraints de conserver le corps de votre proche tué par les forces de l’ordre dans le congélateur car vous avez même l’interdiction d’enterrer son corps ? C’est la triste réalité des Kurdes de Turquie.’’

La première journée de sensibilisation au centre-ville dans le cadre de cette grève de la faim s’est globalement bien déroulée, marquée toutefois par diverses provocations de groupes turcs proches de l’AKP ou des Loups Gris (mouvement néofasciste turc). Une militante nous explique : ‘‘Nous sommes restés disciplinés et n’avons pas répondu aux provocations. Ils veulent nous empêcher de parler de la situation au Kurdistan, mais nous allons poursuivre notre action, dans le calme.’’ La police s’est toutefois rapprochée du rassemblement suite à cette suite d’agressions… non sans demander que cessent les slogans contre Erdogan et son gouvernement ! Un comble !

Le prétexte du terrorisme

GF_02C’est sous prétexte de lutter contre le terrorisme qu’Erdogan a lancé son offensive en commençant par rompre les pourparlers de paix qui avaient été entamés en 2013 avec le PKK (Parti des Travailleurs du Kurdistan). De quoi les autorités turques ont-elles peur ? ‘‘Le HDP, un parti pro-kurde, a franchi pour la première fois le seuil électoral antidémocratique de 10% pour entrer au gouvernement. Son autorité faiblit, et beaucoup de Turcs se sont aussi orientés vers le HDP. Erdogan considère comme une nécessité vitale de stopper ce rapprochement entre Kurdes et travailleurs turcs.’’ (pour en savoir plus, nous invitons le lecteur à prendre connaissance des précédents articles publiés sur socialisme.be à ce sujet ici et ici).

Il est vrai que ces dernières années ont été marquées par un remarquable renouvèlement des luttes dans le pays. En octobre dernier, une grève générale de deux jours avait immédiatement suivi les attentats d’Ankara (pour lesquels la politique de l’AKP est à blâmer). Cela a clairement illustré la puissance potentielle de la classe des travailleurs. Malheureusement, cette grève n’a pas été suivie d’un appel à intensifier la mobilisation, en laissant ainsi le mouvement sans stratégie claire (voir notre article à ce sujet). L’année 2013 avait été marquée par le formidable mouvement de masse du Parc Gezi (pour en savoir plus : Une ‘‘violence guerrière’’ pour écraser le mouvement – Leçons d’une lutte de masse). En 2014, catastrophe de Soma, le pire désastre minier au monde en 40 ans, avait aussi déclenché de larges protestation ouvrières (voir notre article à ce sujet).

A cela s’ajoutent encore les victoires remportées par les combattants kurdes en Syrie contre Daesh (organisation qui bénéficie par ailleurs du soutien de l’Etat turc). Il devenait urgent pour Erdogan de s’engager dans une répression féroce contre le peuple kurde mais aussi contre ses opposants politiques de manière plus globale.

GF_03Nous avons aussi discuté de l’attentat à la voiture piégée de ce 17 février à Ankara contre un convoi de soldats. L’Etat turc a été marqué par plusieurs attentats dans la période récente (plusieurs d’entre eux ayant spécifiquement pris pour cibles des militants de gauche et kurdes et ayant été commis par Daesh, comme à Suruç). Mais ce dernier attentat a été revendiqué par le TAK (les Faucons de la liberté du Kurdistan, un groupe distinct du PKK). Une militante kurde exprime, avec l’assentiment général : ‘‘nous pouvons comprendre une certaine volonté de revanche, mais de tels attentats ne vont faire que renforcer tout le discours d’Erdogan selon lequel chaque Kurde est un terroriste.’’ Cet attentat est un cadeau pour poursuivre sa politique de répression et de diviser pour mieux régner et renforcer sa campagne médiatique nationaliste, démagogique et manipulatrice.

Un orage qui risque d’éclater

Commentant les dramatiques évènements de Cizre, nos camarades turcs de Sosyalist Alternatif (Section du Comité pour une Internationale Ouvrière dans l’Etat turc) écrivaient récemment : ‘‘Le pays est tel un ciel avec deux sombres nuages, l’un à l’Est et l’autre à l’Ouest, qui se chargent jour après jour en électricité et qui risquent d’entrer en collision. Mais il est certain qu’il n’y aura qu’un seul gagnant de cette collision, Erdogan et les magnats qu’il représente.’’

‘‘La classe ouvrière turque n’a aucun intérêt à priver les Kurdes de leurs droits civils et démocratiques. Au contraire, elle doit s’unir aux travailleurs et aux pauvres kurdes contre la répression et l’exploitation, en soutenant les revendications démocratiques des Kurdes. De leur côté, les Kurdes doivent consciemment lancer appel à leurs frères et sœurs de classe à l’Ouest dans le but de construire une lutte commune et unitaire contre les politiques antisociales et sécuritaires d’Erdogan. (…) Ce qui est arrivé en Irak et en Syrie comprend d’importantes leçons et avertissements pour la classe ouvrière de l’Etat turc. Le choix posé est le suivant : une lutte commune et égalitaire contre le système capitaliste ou le chaos, la guerre civile et plus encore de violence d’Etat.’’


Socialisme 2016

Lors de la journée Socialisme 2016 qui se déroulera le 9 avril prochain, nous accueillerons Cédric Gérôme, représentant du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) et particulièrement en charge du développement du travail politique du CIO dans cette région. (Plus d’infos et programme complet)

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