Exécutions de masse en Arabie Saoudite, tensions régionales et troubles sociaux

President Barack Obama and first lady Michelle Obama stand with new Saudi King Salman bin Abdul Aziz they arrive on Air Force One at King Khalid International Airport, in Riyadh, Saudi Arabia, Tuesday, Jan. 27, 2015. (AP Photo/Carolyn Kaster)

La récente exécution de 47 prisonniers par le régime saoudien a largement été condamnée comme étant barbare. Ces meurtres ont également intensifié les tensions avec le principal rival politique régional de l’Etat pétrolier ; l’Iran. Le régime des mollahs avait mis en garde contre l’exécution du responsable chiite le cheikh Nimr al-Nimr Baqr, un adversaire politique de premier plan du régime sunnite saoudien.

Par Simon Carter, Socialist Party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et au Pays de Galles)

La clique dirigeante saoudienne, qui a exécuté 151 personnes l’année dernière (essentiellement pour des infractions non-violentes liées aux drogues), a déclaré que les exécutions concernaient des «terroristes». Mais le système judiciaire répressif du pays est bien connu pour sa chasse aux sorcières contre les dissidents, en particulier parmi la communauté de la minorité chiite. L’Iran, de son côté, est également un pays bien connu pour ses régulières exécutions d’opposants politiques depuis la révolution de 1979 (voir notre dossier sur ce sujet). Les deux puissances régionales étaient déjà en conflit de par leurs guerres par procuration en Syrie et au Yémen.

Depuis ces exécutions, l’ambassade d’Arabie saoudite à Téhéran, en Iran, a été incendiée, alors que Téhéran a accusé l’Arabie saoudite « d’intentionnellement » bombarder son ambassade à Sanaa, la capitale du Yémen. Ce développement des antagonismes a eu un effet polarisant sur les classes dirigeantes de la région.

En dépit du fait que les dirigeants féodaux d’Arabie saoudite ont à leur actif l’un des pires records de tous les pays du globe concernant les droits humains, les critiques se font entendre du bout des lèvres. Les condamnations sont très prudentes. Le Foreign Office britannique, suivant en cela l’attitude du premier ministre conservateur David Cameron, a simplement exprimé sa « préoccupation ». Le Ministre des Affaires étrangères Philip Hammond a laissé entendre qu’il y avait peu d’intérêt à condamner ses exécutions puisque cela ne suffirait pas à changer l’état d’esprit des dirigeants saoudiens.

Il y a un an à peine, David Cameron de même qu’une foule d’autres dirigeants occidentaux prétendument «démocratiques» s’étaient rendus en Arabie saoudite afin d’assister aux funérailles du monarque absolu le roi Abdallah et d’approuver l’arrivée au trône de son demi-frère le prince Salman.
La réticence des gouvernements occidentaux à critiquer la Maison des Saoud a beaucoup à voir avec les armes et les autres contrats lucratifs conclus avec le régime ainsi qu’avec les vastes réserves de pétrole de l’Arabie saoudite. Le régime est aussi une puissance régionale-clé qui est vitale pour la défense des intérêts géopolitiques des gouvernements occidentaux au Moyen-Orient.

En octobre dernier, sur Channel 4 News, David Cameron avait refusé à plusieurs reprises de répondre aux questions concernant le pacte de sécurité secret conclu entre la Grande-Bretagne et l’Arabie Saoudite (qui a vu les deux pays être élus au Conseil des droits de l’homme des Nations unies).

Finalement Cameron a bien dû reconnaitre que le gouvernement britannique entretient « une relation avec l’Arabie saoudite » ce qui signifie « que nous recevons de leur part d’importantes informations aux niveaux des renseignements et de la sécurité. »

Cameron a également admis qu’il n’était pas personnellement intervenu dans le cas largement médiatisée du jeune opposant de 17 ans Ali Mohammed al-Nimr (le neveu du cheikh Nimr Baqr al-Nimr) arrêté durant les manifestations de 2011 et qui est menacé d’exécution.

L’Arabie Saoudite dépend de la vente du pétrole pour 90% de ses revenus. Mais l’effondrement des prix du pétrole a entraîné une croissance imposante du déficit budgétaire du pays, qui a atteint les 15% du PIB l’an dernier, crevant de 100 milliards de dollars sa réserve de changes de 650 milliards de dollars.

En retour, cela a suscité des réductions des dépenses publiques et des hausses des prix de l’essence, de l’électricité et de l’eau. Cette combinaison de réduction des subventions et d’augmentation des taxes ne va qu’approfondir le mécontentement de la population du royaume.

On retrouve sans aucun doute partiellement la peur du développement des tensions internes derrière les récentes exécutions de masse et la répression du régime contre le «terrorisme». Ces exécutions reflètent également la colère des dirigeants saoudiens contre les puissances occidentales et le rapprochement en cours avec l’Iran suite à l’accord conclu sur le nucléaire iranien, en négligeant le fait que c’est le soutien sans faille des puissances occidentales qui a gardé la Maison des Saoud au pouvoir.

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