SNCB : Défendons nos transports, soutenons la grève !

SNCB_pierreDes milliers de cheminots se mobilisent ces 6 et 7 janvier pour empêcher 3 milliards d’euros de coupes budgétaires dans nos transports publics. Au pouvoir depuis un an et demi, le gouvernement Michel sait que dégrader un service aussi fondamental nécessite une campagne de propagande bien orchestrée.

Les nouvelles réductions budgétaires sur les dotations de la SNCB sont évidemment la suite logique des plans d’austérité sans fin appliqués dans tous les services publics depuis le début de la crise. Mais l’acharnement spécifique avec lequel le gouvernement et ses relais médiatiques visent les syndicats cheminots démontre que ce n’est pas l’unique enjeu. Pour cette coalition de droite dure en période de confiance, il s’agit d’attaquer de front un bastion du mouvement syndical réputé pour sa combativité. Affaiblir durablement le rôle des syndicats du rail lui permettrait d’autant plus facilement de mener de nouvelles attaques antisociales à l’avenir, quelque soit le secteur.

Quelques semaines après les beaux discours du sommet climatique de Paris, désinvestir dans un mode de transport qui émet en moyenne 7 fois moins de CO2 / voyageur que la voiture est devenu la priorité du gouvernement. Il sera impossible pour la SNCB d’éviter de nouvelles suppression de lignes ou augmentation de tarifs avec ce budget raboté. Pourtant le nombre de navetteurs a monté en flèche dans les dernières années, et ce malgré la qualité hasardeuse du service. Alors que les études démontrent que la part du train dans les transports devrait continuer à augmenter d’ici 2025, il y a urgence à investir massivement dans le développement du réseau, du matériel, du personnel et du service.

Qui profite ?

Mais pour l’establishment, tout investissement qui ne se transforme pas en bénéfices pour les actionnaires est synonyme de gaspillage. Pour décrédibiliser la résistance du personnel, ils ont mobilisé leurs communicants. On a entendu parler des nombreux jours de congé des cheminots, sans faire référence au 1 000 000 de jours « en attente » pour cause de sous-effectif. Ils ont polémiqué sur les salaires, en oubliant les réveillons travaillés et les nuits trop courtes. Ils leur ont reproché de voyager gratuitement en train, sans jamais préciser qu’aucun frais d’essence n’était remboursé. Ils ont agité les chiffres du « coût du financement des syndicats de la SNCB », alors que celui-ci est principalement composé des cotisations syndicales retenues sur le salaire des travailleurs, et qu’il est donc à leur charge.

Mis en place à partir de 1932, le statut des cheminots fut le résultat du combat des 100 000 travailleurs du rail qui œuvraient chaque jour à faire tourner l’un des secteurs les plus vital de l’économie belge. Manœuvres, guichetiers, contrôleurs, poseurs de voie, secrétaires, mécanos,… autant de professions si différentes se sont unies pour revendiquer leurs droits. Durant la deuxième guerre mondiale les cheminots ont joué un rôle-clé dans la résistance, avant de redoubler d’effort pour reconstruire une bonne partie du matériel qu’ils avaient eux-mêmes saboté contre l’occupant.

La chute d’effectif constante imposée depuis lors fut longtemps tolérée par les appareils syndicaux en échange de nouvelles avancées sociales. Mais à partir des années ’80 et l’arrivée au pouvoir des néolibéraux, des coupes budgétaires drastiques sont imposées à la SNCB. De 68 000 en 1980, les cheminots ne sont plus que 45 000 dix ans plus tard. Leur productivité a ensuite explosé : alors qu’ils transportaient 130 millions de voyageurs par an en 1990, on en dénombrait 235 millions pour 33 000 travailleurs en 2014.

SNCB bashing

Qu’une chronique comme celle de Bruno Wattenbergh (Bel RTL) comparant les travailleurs de la SNCB aux « nobles d’avant la Révolution Française de 1789 » ne provoque pas plus de bruit illustre l’absence de débat démocratique. Ainsi fonctionne la droite dure : après avoir sauvagement coupé dans le niveau de vie de la population, elle montre du doigt les travailleurs les mieux organisés en baptisant leurs droits « privilèges ». Si nous la laissons faire, elle pourrait nous proposer d’abroger le CDI pour mettre fin aux « faveurs » dont disposent ses bénéficiaires par rapport au CDD. Sa recette est toujours la même : organiser le nivellement par le bas des droits sociaux en jouant sur les frustrations qu’elle a elle-même créé.

Il y a quelques semaines, l’ancienne ministre Open VLD Fientje Moerman a pris la plume (sous un autre nom…) dans un « courrier des lecteurs » de la presse écrite flamande. Elle y décrit les travailleurs de la SNCB comme un milieu de privilégiés et de profiteurs, composé à 86%… d’hommes. Le chiffre est juste. Mais elle oublie d’en préciser un autre : 60% des voyageurs de la SNCB sont des femmes. En tentant de justifier la casse du service public au nom des femmes, Moerman oublie de préciser qu’elles en sont la plupart du temps les premières bénéficiaires. Les néolibéraux ne brandissent le principe d’égalité que lorsqu’ils veulent le détruire.

Pour un réinvestissement massif

Alors que les dotations d’état s’amenuisent de gouvernement en gouvernement, la SNCB est d’autant plus gérée comme une entreprise privée. La « rationalisation des coûts » vise toujours le personnel et les voyageurs, tandis que se multiplient le nombre de dirigeants grassement payés, de filiales et de consultants externes. Le désinvestissement public engendre une gestion basée sur les lignes les plus rentables ou sur le transport de prestige, au détriment des zones moins peuplées, des heures creuses et des plus pauvres.

Tristes de ne pas pouvoir confier immédiatement le rail à leurs amis banquiers, les politiciens de droite préparent la libéralisation du trafic intérieur en brisant la tâche du chemin de fer public : transporter efficacement les voyageurs à un prix accessible, partout où c’est possible et pour tous.

Géré et financé dans ce but, le rail est un mode de transport efficace, rapide et écologique. Les dérangements engendrés par la grève pèsent peu en comparaison aux conséquences des nouveaux assainissements. Voyageurs et cheminots ont des intérêts communs : nous devons nous battre pour un plan de réinvestissement public massif dans la SNCB et Infrabel. Nous ne l’obtiendrons jamais par la passivité. Pour des transports en commun accessibles et de qualité : rendez-vous en gare, côté piquet de grève.

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