Attention ! Une attaque contre nos revenus se prépare

La note de Verhofstadt III a de nouveau confirmé que les partis traditionnels flamands veulent poursuivre leur marche sur le chemin de la régionalisation. De son côté, le « front francophone » est lézardé, plus encore depuis que la rivalité entre le MR et le PS a trouvé un nouveau terrain d’expression au sein du gouvernement intérimaire. Mais, ironiquement, la crise économique qui menace notre avenir – les prévisions de croissance pour 2008 ont aussi été revues à la baisse pour la Belgique, en dessous des 2% attendus – pourrait être une chance pour Verhofstadt et Leterme.

Anja Deschoemacker

Le gouvernement intérim de Verhofstadt a disposé dès son entrée en fonction d’une sorte de colle forte : il fallait sauver le pays. Et pourquoi ? Pour pouvoir opérer des coupes budgétaires sur le dos des travailleurs et des allocataires, comme toujours. C’est là que se situe la véritable discussion : comment imposer un plan d’austérité alors que les nerfs du mouvement ouvrier ont déjà été mis à rude épreuve ? Déjà, la diminution du pouvoir d’achat (à cause de l’augmentation rapide des prix ces derniers mois après 20 années de modération salariale et de démantèlement de la sécurité sociale) mène à des revendications salariales et à des actions dans les entreprises.

Comment faire, dans de telles conditions, pour trouver 3,5 milliards d’euros dans les poches de ces mêmes personnes ? La préparation de cet attentat s’effectue activement, avec le PS et le CD&V dans les rôles principaux, car une attaque frontale n’est pas de tout repos dans un pays qui comprend des syndicats aussi forts. Verhofstadt a lui-même appris cette leçon dans les années ’80 : le prix que les libéraux ont eu à payer pour ses propositions ultra-libérales a été 11 années d’opposition.

Quelles dépenses restent encore aux mains de l’Etat fédéral ? La Défense, une partie des fonctionnaires (contre lesquels se préparent aussi des attaques), mais aussi et surtout la sécurité sociale. S’oriente-t-on vers une attaque généralisée contre les restes de ce système déjà fortement érodé ou alors vers une régionalisation partielle de la sécurité sociale sans que les Régions reçoivent de nouveaux moyens ? Chaque option est difficile à réaliser : une réaction des syndicats semble inévitable dans le premier cas tandis que les partis francophones ne pourront jamais vendre une telle mesure à leurs électeurs dans le second.

Revêtir, envelopper, emballer. Ce n’est pas sans raison que l’hypocrisie et la tromperie sont les atouts les plus importants d’un politicien bourgeois. Comme nous avons immédiatement expliqué après les élections qu’il y aurait en fin de compte un accord, nous pensons qu’un nouvel accord sera finalement conclu, quelque chose de proche des propositions avancées par le professeur flamand Bea Cantillon : « Ne pas scissionner, mais responsabiliser ». Selon cette idée, le financement des régions serait conditionné à l’atteinte d’objectifs précis.

Une telle « solution » permettrait au CD&V d’éviter les critiques du côté flamand en expliquant que les régions seraient alors elles-mêmes responsables de l’utilisation de ces fonds nouveaux et que la Wallonie et Bruxelles seraient donc « responsabilisés » sans que l’argent ne continue à se déverser dans un « puits sans fonds ».

Du côté francophone, les partis traditionnels pourraient gonfler la poitrine en clamant haut et fort que la scission aurait été évitée. Quant au grand patronat, il recevrait en définitive satisfaction selon ses désirs – quoiqu’avec un certain retard et plutôt dans le style habituel de la « tactique du saucissonnage » : cette régionalisation «responsabilisante» ouvrirait la voie au démantèlement ultérieur des différents pans de la sécurité sociale. Des revenus issus de la TVA ou d’autres sources de financement qui épargneront les patrons pourront couvrir une partie de ce que les diminutions des charges patronales ne permettent plus de payer, le reste étant destiné à l’assainissement.

Il faut sonner l’alarme pour les travailleurs et les allocataires. Les politiciens bourgeois peuvent rouler des mécaniques autour du thème communautaire, ils sont en réalité en total accord – aussi bien le PS et le CDH que le CD&V – sur le fait que ce sont nos poches qui doivent être « structurellement » vidées. Et s’il faudra changer un petit quelque chose à l’intérêt notionnel en guise de poudre aux yeux, gageons que dans le cas où le gouvernement osera y toucher, on laissera assez de portes ouvertes à l’arrière pour qu’aucun patron ne perde significativement quelque chose! L’hypocrisie et la tromperie, voilà les véritables valeurs de la politique bourgeoise en Belgique, en Flandre, en Wallonie et à Bruxelles !

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