Laminoirs Longtain: Fausse reprise mais vraie saignée sociale.

longtainLa fermeture des laminoirs Longtain a fait du bruit dans la province de Hainaut et en Wallonie mais, d’après nous, certainement pas assez. Les échos des cris de révolte des travailleurs en lutte sont comme étouffés ou, en tout cas, largement déformés par la presse traditionnelle. Il ne s’agit pas ici d’une simple faillite. Si on se penche un peu sur l’histoire de l’éphémère reprise par Stéphane Jourdain (homme d’affaire de la région) on s’aperçoit très vite qu’il y a anguille sous roche. Les manoeuvres financières employées par cet ancien membre du conseil d’administration du cercle de lorraine pour, encore et toujours, s’en mettre plein les poches sont à la limite de la légalité voir carrément illégales. Et cela s’est bien sûr fait au détriment des travailleurs du site qui ne réclamaient qu’une chose: pouvoir reprendre le travail dans des conditions décentes.

Par Max (Mons)

Récapitulatif:

Janvier 2015: annonce d’une faillite de Condesa Belgique (groupe espagnol leader sur le marché européen du tube en métal destiné à l’industrie), 110 emplois sont menacés.

Mars: suite à l’ouverture d’une première procédure de réorganisation judiciaire (PRJ), le tribunal de commerce accepte la proposition de Jourdain. Le voilà actionnaire majoritaire de la société qui bat de l’aile. Directement, il clame ses intentions de relancer l’entreprise et parle de reprendre 36 travailleurs pour, l’année suivante, en embaucher d’autres. Mais les choses ne se passent soit disant pas comme prévu. Prétextant une mauvaise évaluation des profits potentiels et des coûts de production dans les conditions actuelles ainsi qu’un nom respect de la loi en matière de conditions de rémunération des travailleurs, il commence à révéler de plus en plus ses vraies intentions. Une destruction totale des acquis sociaux des salariés pour rogner un maximum sur les coûts de production s’annonce. Les travailleurs qui se sont déjà mis en lutte une première fois lors de la PRJ ne se laisseront pas faire et reprennent la lutte. Jourdain dira bientôt qu’il a  »fait une erreur » avec cette reprise. Mais nous ne sommes pas dupe, nous ne pouvons pas croire une seconde que tout cela n’est pas volontaire et calculé à l’avance, en voici la preuve.

Avril – juillet: il signale aux travailleurs le transfert des avoirs de l’entreprise dans une nouvelle entreprise. Pourtant, l’entreprise est dans les faits scindée en deux. D’un coté une entreprise du nom de Vieux Waleffe s.a. (société de gestion immobilière) et de l’autre CCB (SPRL Condesa Commercial Belgium). Jourdain affirme aux travailleurs que tout les avoirs appartiennent désormais à CCB. En fait, il s’agit d’un mensonge de plus car l’immobilier de l’entreprise (les bâtiments et terrains, estimés à 17 millions d’euros) reste sous la propriété de Vieux Waleffe. Cette dernière manoeuvre lui sera bien utile lorsqu’il déclarera CCB en faillite. Une nouvelle PRJ est lancée tandis que la lutte des travailleurs continue, eux qui s’attendaient à une pareille nouvelle sous peu avec l’inquiétude qui y est liée. Comme si cela ne suffisait pas, Jourdain, dont l’audace n’a d’égal que ses capitaux, annonce qu’il se présente comme candidat repreneur de sa propre entreprise! Il aurait pu choisir de descendre directement sur le site de production pour cracher au visage de chaque travailleurs mais il a encore une fois préféré aller se cacher derrière la loi qui permet visiblement plus que ce qu’il est difficile de se l’imaginer en matière de faillite et reprise… Évidement, s’il décide de procéder à ce jeu infâme c’est parce que son intérêt y est grand, en reprenant une nouvelle fois l’entreprise, il peut de nouveau imposer de nouvelles conditions salariales et de travail (baisse de la rémunération, abandons de primes, annulation de l’ancienneté,…). Ce joli package anti-social ne passe pas auprès des travailleurs et des syndicats.

Aout: la lutte s’intensifie et une occupation du site se met en place. Jourdain se saisit alors de l’appareil policier pour déloger les travailleurs de l’intérieur du site. Mais cela ne les arrête pas pour autant: ils décident de bloquer l’usine depuis l’extérieur. Tandis que la police use de répression et menace d’amendes les membres du personnel des laminoirs, la région Wallonne, elle, est bien tendre avec le « repreneur » lorsqu’elle lui revend sans aucun garde-fou, via la Sogepa (Bras financier de la R.W.), les parts qu’elle possédait dans l’entreprise (49,9% des actions) en laissant à Jourdain 2 ans pour rembourser l’équivalent de 1,75 millions d’euros… Les délégués dénoncent la passivité de la région Wallonne qui devrait, d’après eux, réclamer l’argent immédiatement et imposer à celui qui est maintenant l’unique actionnaire l’octroi des volets sociaux nécessaires pour les licenciés.

C’est dans ce contexte que nous les avons rencontrés pour recueillir les propos résumés plus haut et aussi ceux que voici: un matin les travailleurs ouvrent les bureaux de l’entreprise pour y découvrir que les données informatiques concernant les commandes éventuelles et les chiffres nécessaires à l’élaboration d’un dossier de reprise en bonne et due forme ont disparu. Cinq ordinateurs ne sont plus là, il n’y a pas non plus traces d’effractions. Tout laisse à penser que ce vol a été commis pour le compte de Jourdain qui a envoyé des gens pour empêcher l’organisation des travailleurs de se servir de ces chiffres. Bien évidement, on ne peut accuser sans preuves mais il faut bien avoir en tête que cette pratique est assez courante dans ce genre d’affaire.

Pour les travailleurs des laminoirs, l’affaire est maintenant devenue très claire voir transparente: Jourdain n’a jamais eu l’intention de relancer quoi que ce soit. Il cherchait simplement à faire une plus-value financière immobilière importante en rachetant à bas prix une société en faillite située sur des terrains qui valent plus une fois revendus séparément du fond de commerce. Pour avoir suivis
d’autres conflits et d’autres luttes sur d’autres entreprises, nous ne nous étonnons plus de ce genre de manigances mais nous sommes par contre à chaque fois toujours autant révoltés! Et ne doutons pas que si les relais médiatiques traditionnels (Tv, radio, presse grand tirage,…) rentraient plus dans le détail de ce genre d’affaire au lieu de les survoler par soucis  »d’objectivité » en omettant les points cruciaux que sont la perte des acquis sociaux, le non respect des procédures de licenciement et le jeu financier des reprises à répétition, il y aurait bien plus de gens solidaires des travailleurs de ces entreprises. L’indignation que suscite la révélation des dessous de ce genre d’affaire est légitime et doit être utilisée à la construction d’un mouvement ouvrier fort pour faire face aux prochaines attaques patronales.

Nous ne pouvons pas laisser impunément agir les Jourdain et Cie dont la soif de profit s’assouvit au dépens des conditions de travail des plus faibles. Voilà ce que ce système a à offrir à la classe ouvrière! Le PSL milite activement pour un changement de société afin d’en finir avec l’exploitation du travail, cela nécessite un rapport de force favorable à notre classe qui ne sera possible que parce que les exploités l’auront construit dans l’unité!

Sources:

Manage: les Laminoirs de Longtain vont connaître une deuxième vie
– Laminoirs de Longtain: trois mois pour trouver un repreneur
Bois-d’Haine: les Laminoirs de Longtain à nouveau en réorganisation judiciaire
– La Louvière: retour à la case départ pour les Laminoirs de Longtain
Jourdain s’est engagé à racheter les parts de la Sogepa dans les Laminoirs de Longtain
Longtain à Bois d’Haine: la police est venue demander la fin de l’occupation

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