La Méditerranée, ce charnier du capitalisme

crise_refugiesLes drames récents en mer Méditerranée sont une macabre illustration de l’incapacité du système à répondre aux crises qu’il génère. Les guerres, la misère économique, les dégradations environnementales, l’instabilité politique, l’absence de sécurité et le non-respect des droits élémentaires entrainent une augmentation des demandes d’asile. Quelle est la réponse du capitalisme et de ceux qui défendent ce modèle ? Quelle alternative mettons-nous en avant ?

Par Alain (Namur)

Le drame du 19 avril 2015 et le chacun-pour-soi de l’Union européenne

Le naufrage d’un bateau à 220 kilomètres de L’ile Lampedusa en Italie a causé la mort d’environ 700 personnes. Selon C. Sami, porte-parole du Haut-Commissariat aux Réfugiés, si ces chiffres se confirment il s’agit de ‘‘la pire hécatombe jamais vue en Méditerranée’’. Cette mer devient la route la plus dangereuse du monde. (Libération, 19 avril 2015)

Le nombre de morts en Méditerranée est en augmentation depuis que l’Europe a repris les missions de sauvetage par l’intermédiaire de son agence Frontex. En 2013, suite à la pression populaire et à l’émotion suscitée par les drames à répétition sur ses côtes, l’Italie avait mis en place une opération de surveillance et de sauvetage au large de ses côtes, nommée Mare Nostrum. Celle-ci a permis de sauver 150.000 personnes en un an. Toutefois, dans les pays du sud de l’Europe – particulièrement touchés par la question migratoire – tous les courants de droites ont instrumentalisé cette question. Ainsi, en Italie, la Ligue du Nord, l’ancien parti de Berlusconi, mais aussi Beppe Grillo (du Mouvement des 5 étoiles) ont critiqué cette démarche. Ils ont notamment mis en avant le cout : 9 millions d’euros à la seule charge de l’Italie.

L’Union européenne a depuis développé sa propre opération de sauvetage nommée Triton. Cependant, les moyens affectés ne sont que de 2,9 millions d’euros avec moins de matériel alloué pour mener à bien cette tâche. Pour l’Union européenne, la seule solution est la répression et la militarisation. La Commission européenne a décidé de dépêcher des bâtiments de guerre au large des côtes libyennes et lancent des opérations de type Mos Maiorum visant à arrêter les immigrants en situation irrégulière.

Parallèlement à cela, le Président de la Commission européenne émet également l’idée de répartir les réfugiés entre les différents pays de l’UE par une méthode de quotas qui seraient fonction du nombre d’habitants et de paramètres économique. Mais cette idée se heurte à la résistance de plusieurs pays comme le Royaume-Uni, la Pologne et les États baltes.

Les causes des migrations

Depuis que l’humanité est, des phénomènes migratoires ont existé. Ceux-ci ont eu des causes multiples à travers l’Histoire. Poussé par la recherche de nourriture, par des contraintes écologiques, par la compétition pour les ressources naturelles (etc.), l’Homme s’est déplacé. L’espèce humaine telle que nous la connaissons est née près de la vallée du Rift et a, depuis, colonisé toutes les niches écologiques habitables.

À l’heure actuelle, les crises du système et ces différentes manifestations poussent les gens à émigrer et à aller demander l’asile. Les chiffres du Haut-Commissariat aux Réfugié(e)s sont clairs : 900.000 demandes d’asile ont été enregistrées en 2014. C’est une augmentation de 45% par rapport à 2013. L’origine des demandeurs est à mettre en parallèle avec les actuelles impasses géostratégiques de la politique occidentale au Proche et Moyen- Orient : 150.000 demandes de Syriens (une demande d’asile sur cinq dans les pays industrialisés), 68.000 demandes d’Irakiens, 60.000 demandes d’Afghans, suivent ensuite les Serbes et les Érythréens.

En termes de pays d’accueil, pour les pays industrialisés, c’est l’Allemagne et les États-Unis qui ont recueilli le plus de demandes (respectivement 173.000 et 121.000). Mais ne nous y trompons pas ! Si tous les courants de droite utilisent cette question pour diviser les travailleurs sur base de l’austérité, il faut rappeler que la plupart des déplacés de pays en crise le sont au sein du pays lui-même et dans les pays voisins. La Turquie accueille ainsi 1,5 million de réfugiés syriens.

Les immigrés, une main d’oeuvre bon marché

Pour le patronat, il est très intéressant de disposer d’une main-d’oeuvre bon marché et pour qui s’organiser pour défendre ses revendications reste compliqué. Cela permet de faire pression à la baisse sur les conditions de travail et de vie de tous les salariés. C’est ainsi que le ministre de l’Intérieur italien A. Alfano a rappelé qu’il était légalement possible de faire travailler les migrants gratuitement. Actuellement, c’est en Allemagne que ce débat connait le plus de vigueur, notamment face à l’émergence du mouvement anti-immigration et anti-islam Pegida. Le patronat soutient l’immigration choisie pour son industrie afin de diviser les travailleurs pour toucher toujours plus de profits. En effet, au-delà du vieillissement de la population, les patrons allemands sont confrontés à une remontée des luttes syndicales. Ces dernières ont récemment conduit à l’adoption d’un salaire minimum, mais aussi à des augmentations substantielles de salaires, notamment dans le secteur de la métallurgie.

Notre réponse : la solidarité au-delà des frontières et quel que soit le statut.

Contrairement à ce que propose le secrétaire d’État à l’Asile et aux Migrations Théo Francken (N-VA), nous ne pensons pas que bombarder les bateaux au départ des côtes africaines soit la solution! Les voies terrestres et aériennes étant bloquées, l’Union européenne veut désormais s’attaquer à la voie maritime. Cependant, tant que les causes profondes qui poussent les personnes à émigrer seront présentes, on ne fera qu’amonceler des tombes à nos frontières.

Le bombardement de la Lybie par les États impérialistes y a créé des conditions de quasi-guerre civile. Dans cette situation, des seigneurs de guerre et des bandes mafieuses se livrent au commerce de la misère humaine. Le même processus est à l’oeuvre en Irak et en Afghanistan. La déstabilisation de la Syrie n’a fait qu’amplifier le phénomène. Nous devons continuer à nous opposer à toutes les guerres et interventions impérialistes, car comme la situation actuelle l’indique, elles ne créent que davantage de misère. Il nous faut soutenir dans ces pays les mobilisations des masses en faveur de l’amélioration de leurs conditions de vie et de travail.

Nous devons également nous battre dans notre propre pays pour lutter contre la politique d’austérité. En effet, c’est au nom de ce genre de politique que l’Italie a abandonné Mare Nostrum. Nous devons aussi lutter pour renforcer l’organisation et l’implication dans la lutte de tous les travailleurs, quel que soit leur statut. Cela permettra de lutter contre la concurrence entre travailleurs dans la situation de chômage de masse que nous subissons. L’implication des travailleurs sans-papiers dans les récentes manifestations et actions syndicales est en ce sens un excellent signal d’unité.

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