Chili : Manifestations de masse pour un enseignement gratuit

Un nouveau chapitre s’ouvre dans crise politique et «morale» du pays.

chili10Des centaines de milliers de manifestants, des jeunes mais aussi des travailleurs ou encore des personnes âgées, sont descendues dans les rues des grandes villes du Chili en exigeant que le gouvernement rencontre les exigences des étudiants. Les slogans comportaient notamment le suivant «La corruption ne doit pas décider de notre éducation!» Une des revendications centrales est la gratuité de l’enseignement et le fin de la logique de profit dans le secteur.

Par Patricio Guzman, Socialismo Revolcuionario (section du Comité pour une Internationale Ouvrière au Chili)

Les enseignants des collèges ont rejoint l’appel à l’action, en exigeant une carrière décente et la défense de l’enseignement public. Malheureusement, ces manifestations ont été marquées par la nouvelle de la mort injustifiable de deux jeunes, à Valparaiso. De nouvelles manifestations ont eu lieu dans de nombreuses villes dès que ces tragiques événements ont été connus.

Les promesses faites par le gouvernement Bachelet concernant la gratuité de l’enseignement et la fin des profits réalisés dans le secteur n’ont pas été suivies d’effet. La présidente a même nommé ministre Marcos Barraza alors qu’il est directement impliquée dans le scandale des projets lucratifs de l’Université Arcis (qui s’est retrouvée au bord de la faillite). C’est se moquer des gens!

Les manifestants ont également exprimé la colère qui s’est accumulée contre la corruption de la caste politique capitaliste et des grandes entreprises. Les manifestants sont en colère contre les bas salaires, les mauvaises conditions de travail et les abus de toutes sortes. Ces manifestations géantes représentent la première réponse du mouvement social face au nouveau cabinet du gouvernement clairement néolibéral de Bachelet. Le ministre des Finances, bien aimé des employeurs, a notamment travaillé pour le Fonds monétaire international et pour diverses grandes banques américaines. Dès ses premiers instants, le nouveau gouvernement a suscité une grande méfiance de la part des travailleurs. La cote de popularité du gouvernement chilien est en chute libre. (Un peu plus d’un an après son élection triomphale, avec 62% des voix, Michelle Bachelet se retrouve au plus bas dans les sondages : seuls 31% des Chiliens lui accordent leur confiance, NDT).

Après une longue période durant laquelle les dirigeants étudiants ont été paralysés par des pourparlers peu concluants, les étudiants ont à nouveau montré leur force dans la rue en défiant le gouvernement Bachelet et ses tentatives désespérées destinées à éviter les enquêtes de corruption concernant les services fiscaux.

Marcher, ce n’est pas assez!

Ces manifestations ont été une magnifique démonstration de force, mais manifester est insuffisant. La CONFECH (Confédération des étudiants du Chili) et le mouvement étudiant ont gagné la légitimité et le droit de faire un pas en avant. Nous ne pouvons pas continuer à défiler des années durant, en vain. Nous devons forcer le gouvernement et la caste politique à accepter les revendications sociales par un appel concret à la désobéissance civile pacifique et massive, non seulement pour un enseignement gratuit et la fin de la logique de profit dans l’éducation, mais aussi pour la fin de toutes les institutions héritées de la dictature et consolidées par les divers gouvernements successifs depuis lors. Nous devons viser à mettre bas au modèle néolibéral et prédateur d’accumulation du capital et de concentration des richesses!

Nous pensons également qu’il est nécessaire d’unifier les luttes sociales à travers le pays. Isolés, nous ne pouvons pas gagner. Ensemble, notre force peut être imbattable. La CONFECH et les syndicats et organisations sociales qui ont montré leur volonté de combattre doivent convoquer une assemblée nationale des étudiants et des travailleurs. Cette assemblée devrait prendre pour point de référence les revendications formulées par de larges sections de la population – pour la conquête de droits sociaux, contre la corruption politique et des grandes entreprises – et appeler à une protestation nationale et à 24 heures de grève générale.

Ces protestations ont ouvert un nouveau chapitre dans la crise politique et «morale» du pays, qui frappe depuis huit mois le gouvernement et le monde politique et des entreprises.

Plus d’un millier de travailleurs en grève de Brinks et Prosegur ont défilé dans les rues de Santiago, en lutte pour de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail. Ce fut un avant-goût de ce qui allait venir ensuite avec les manifestations étudiantes massives. Les masses ont fait irruption dans l’arène publique. Il est de notre responsabilité d’approfondir la crise en ouvrant la voie à vers résultat positif pour les masses : la convocation d’une Assemblée constituante destinée à mettre fin à l’héritage de la dictature et des gouvernements civils néolibéraux. Ce doit être l’une des étapes du processus de reconstruction des forces de la gauche révolutionnaire et socialiste.

Après la première année des projets de réformes ambiguës du gouvernement Bachelet (rien en comparaison des précédentes réformes du travail), après huit mois de scandales de corruption permanents (dont l’un impliquant directement la présidence), le soutien au gouvernement a été démoli. Nous sommes entrés dans une nouvelle période. La crise générale de la légitimité du gouvernement reste à son point le plus haut et l’explosion de la jeunesse et les manifestations de masse n’en sont qu’une expression.

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