Élections au sommet de la FIFA

“A mesure que le sport s’est transformé en industrie, il a banni la beauté qui naît de la joie de jouer pour jouer.” (Eduardo Galeano)

Le 29 mai, la FIFA (Fédération internationale de football association) organise ses élections présidentielles. L’actuel président, Sepp Blatter, est défié par trois autres candidats qui, tous, promettent de rompre avec la corruption et la mauvaise gestion financière de la puissante organisation internationale de football. Une chose est pourtant claire : entre nous, plus personne ne croit que la FIFA peut être réformée.

Par Tim (Bruxelles)

Il est tout d’abord peu probable que quelqu’un d’autre que Sepp Blatter siège en tant que président de la FIFA après le 29 mai. Les présidents des confédérations asiatique (AFC) et africaine (CAF) ont déjà déclaré que leurs fédérations nationales voteraient en bloc pour Blatter. La confédération africaine et son président Issa Hayatou sont depuis des années impliqués dans une série d’accusations de corruption. Hayatou aurait ainsi reçu des pots de vin en échange de son appui pour l’attribution de la Coupe du monde de football au Qatar en 2022. Les résultats de l’enquête officielle sur ces allégations ont été tenu secrets par Blatter & Cie. Le soutien de Hayatou à la candidature de Blatter serait-il un remerciement pour services rendus ?

Que des choses louches se passent à la FIFA, c’est le moins que l’on puisse dire. L’organisation a gagné énormément d’argent en exploitant commercialement le sport le plus populaire au monde. Les considérations éthiques ont dû céder face à la course au profit. La FIFA a gagné 4 milliards de dollars sur base du Mondial 2014 au Brésil, soit 66% de plus qu’au Mondial 2010. Il s’agit d’un montant plus élevé que le PIB des 34 pays les plus pauvres au monde. La FIFA est une organisation avec un immense pouvoir. Les pays qui sont candidats pour organiser une Coupe du monde doivent offrir une exemption d’impôts à la FIFA et sont obligés de changer les lois et règlements qui ne sont pas du goût des sponsors. Le FIFA encaisse les profits, les pays organiseurs doivent payer la note. Le Brésil a dépensé plus de 11,6 milliards d’euros en infrastructure pour le Mondial, soit 61% de son budget pour l’éducation. La construction de stades au Brésil, en Afrique du Sud, en Russie et au Qatar s’accompagne d’une énorme corruption, et l’utilisation parfois pure et simple de la main-d’œuvre esclave. Lorsque certains ouvriers meurent à cause des mauvaises conditions de travail, la FIFA s’en lave les mains.

FIFA : réforme ou révolution ?

Il n’est donc pas surprenant que le principal slogan de campagne de l’ancienne star du football portugais Luis Figo, l’un des concurrents à Blatter pour la présidence, soit : ‘Réformer la FIFA’. Mais soyons clairs : réformer la FIFA est une illusion. Même si les motivations de Figo sont peut-être sincères, ses paroles nous font penser à l’appel de la présidente du FMI Christine Lagarde lors du Forum économique mondial pour un capitalisme ‘‘juste et équitable’’. Elle essayait ainsi de créer l’illusion qu’un capitalisme réformé serait possible, sans exploitation ni pauvreté. Mais tant pour la FIFA que pour le capitalisme, de telles réformes sont impossibles.

Au sein du système capitaliste, un sport populaire comme le football devient très vite le terrain de jeu de ceux qui cherchent des profits, ou simplement des voyous. Des groupes d’investissement obscurs achètent et vendent des joueurs et des équipes de la même manière qu’ils jouent en bourse. Les traditions des clubs, les expériences des fans pour qui leur équipe est souvent une partie importante de leur vie, et même la survie de l’équipe en elle-même sont d’une importance secondaire.

L’auteur marxiste Eduardo Galeano, récemment décédé, écrivait dans son œuvre magistrale sur le football, ‘‘Le football, ombre et lumière’’, “A mesure que le sport s’est transformé en industrie, il a banni la beauté qui naît de la joie de jouer pour jouer.” Son livre est une expression de l’amour de millions de personnes à travers le monde pour le football, la beauté du jeu lui-même, mais aussi sur la manière dont ce jeu est abusé par les capitalistes pour en tirer des profits, ou de la reconnaissance.

Dans le système capitaliste, la FIFA est le sous-produit inévitable du football. C’est pourquoi toute tentative pour réformer cette organisation au sein de ce système est vouée à l’échec. Pour débarrasser le football de la FIFA, nous devons libérer l’humanité du capitalisme. Seule une société socialiste, où les richesses sont sous la gestion démocratique de l’ensemble de la population, et les clubs sous la gestion des fans et des joueurs, nous permettrait de travailler à mettre sur pieds une nouvelle fédération internationale de football, basée sur le respect pour le sport, et non sur la course au profit.

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