Bayer/Lanxess. 3,5 milliards de bénéfices… Mais 379 emplois menacés !

En 2006, les bénéfices du groupe chimique Bayer ont augmenté de 14 % et atteint 3,5 milliards d’euros, un nouveau record pour le groupe. Cela ne suffit encore pas à la direction qui, pour assurer que les bénéfices continueront dans les années à venir, a préparé un plan d’économies passant par le développement de la sous-traitance et la scission de l’entreprise en entités plus petites.

Geert Cool

La direction a beau faire des tours de passe-passe avec les chiffres, ces restructurations devraient coûter à Anvers 244 emplois chez Bayer et 135 chez Lanxess, soit un total de 379 emplois.

En réponse aux plans patronaux, les délégations syndicales de Bayer/Lanxess ont immédiatement organisé l’information des travailleurs et quelques actions ciblées, en particulier sur la question de la sécurité qui était menacée par la possibilité du passage de ce service en sous-traitance.

Suite à cela, la direction a été contrainte d’annoncer lors d’un conseil d’entreprise spécial mercredi 17 octobre que la suppression des services d’intervention (service incendie et services médicaux) serait réétudiée. En outre, les travailleurs qui seraient touchés par la sous-traitance conserveraient les modalités de leur convention de travail actuelle avec Bayer/ Lanxess.

Ces concessions faites par la direction lors de l’ouverture des pourparlers sur les plans de restructuration ayant été jugées importantes, les actions ont été temporairement suspendues. Les négociations sur les divers aspects des restructurations pourraient encore durer des mois.

Il est important que ces négociations commencent avec un recul de la direction suite à des actions bien organisées au cours desquelles la solidarité de tous les travailleurs dans les différentes implantations de Bayer et de Lanxess à Anvers s’est vigoureusement exprimée.

Par le passé, des plans d’économies de Bayer ainsi qu’un autre plan de scission entre Bayer et Lanxess ont déjà été empêchés par le personnel. A chaque fois, cela s’est fait sur base d’une solidarité entre les travailleurs des divers sites et d’une résistance active. C’est encore sur cela que les travailleurs devront se baser dans les mois à venir !


Pourquoi faire des économies sur le dos des travailleurs ?

  1. Le personnel n’est-il pas assez productif ?

    En 2003, Bayer avait un chiffre d’affaires de 1.134 millions d’euros avec 2.072 travailleurs, ce qui équivaut à 0,55 million d’euros par travailleur. En 2006, le chiffre d’affaires était de 1.100 millions d’euros avec 917 travailleurs, soit 1,1 million d’euro par travailleur.

    La productivité a donc doublé en 4 ans !

  2. Les salaires sont-ils trop élevés et donc impayables ?

    En 2006, les salaires et frais de personnel ne représentaient que 8,7% du chiffre d’affaires. Et pourtant, c’est cet argument qui est mis en avant par la société. Dans la Gazet van Antwerpen de mai 2006, Ulrich Koemm (dirigeant de Lanxess) affirmait “qu’un travailleur dans la chimie à Anvers a presque 60 jours de vacances par an. C’est trop. En Chine, ils en ont maximum 15.” Apparemment, la direction rêve d’imposer des conditions de salaires et de travail à la chinoise à Anvers.

  3. La pression fiscale est-elle trop élevée ?

    Les diverses mesures de Verhofstadt ont permis de faire tomber la pression fiscale réelle chez Bayer à un maigre 7,8 %. Si elle doit continuer à baisser, Bayer/Lanxess ne devra bientôt plus payer d’impôts et ne fera plus que recevoir des moyens de la collectivité en cadeau.

Comment la direction veut-elle faire des économies ?

  1. Scinder

    La première manière envisagée pour économiser est de poursuivre la scission de l’entreprise entre Bayer et Lanxess. En novembre 2003, la direction avait annoncé qu’elle allait se défaire de certaines activités.

    Un accord sur la structure de l’entreprise à Anvers a été conclu dès décembre 2003 : la scission a eu lieu mais on a maintenu un seul conseil d’entreprise et un seul comité de prévention et de protection sur le lieu de travail. En même temps, une garantie de sécurité d’emploi a été définie dans une convention collective de travail (CCT) avec des primes remarquablement élevées en cas de licenciements éventuels. Cette CCT est valable jusqu’au 31 décembre 2008.

    A présent, la direction veut progressivement mettre un terme aux accords de collaboration entre les deux entreprises (il y a 70 contrats de ce type actuellement). Cette collaboration est remise en question pour pouvoir économiser plus vite et de façon plus efficace. Tout le processus de séparation de Lanxess au sein du groupe Bayer a ce but : fin 2003, il y avait encore 20.423 travailleurs dans ce qui est Lanxess aujourd’hui et fin juin 2007, le compteur indiquait 16.400. En 4 ans, on a donc perdu 1 emploi sur 5.

  2. Sous-traiter

    Ce qu’on appelle la “sous-traitance” est une autre méthode pour pouvoir produire meilleur marché : certains services ne sont plus assurés par la société elle-même, mais sous-traités à des entreprises qui viennent fournir les services (on les appelle les providers). Ainsi, la société peut fonctionner avec une partie du personnel qui travaille pour de petites entreprises fournisseuses de services qui n’ont ni fonctionnement syndical réel ni conditions de travail et de salaire valables. La direction peut ainsi augmenter encore plus la flexibilité. La sous-traitance est une forme de traite des êtres humains pour économiser sur le dos des travailleurs

  3. Rogner sur la sécurité

    Un des services menacés chez Bayer/Lanxess est le service assurant la sécurité et l’assistance médicale. Comme les travailleurs de ce service l’ont fait remarquer dans les médias, ceci est particulièrement dangereux, pas seulement dans l’usine elle-même, mais aussi pour les alentours de l’usine.

    En sous-traitant la sécurité ou en économisant dans ce domaine, on joue avec des vies. Car une entreprise chimique n’est pas une biscuiterie mais une société de type Seveso (c’est-à-dire présentant de hauts risques en matière de pollution). Or, le service incendie ne « coûte » que 6 millions d’euros par an à la société. C’est sans doute encore trop pour la soif de profit des actionnaires.

  4. Produire plus avec moins de monde

    Finalement, la direction veut maintenir le chiffre d’affaires au même niveau, mais avec moins de personnel. Apparemment, elle espère que l’énorme augmentation de productivité des dernières années se poursuivra éternellement. Produire plus avec moins de monde est un fantasme des actionnaires qui risque de tourner de plus en plus au cauchemar pour les travailleurs (à cause du stress, de la pression accrue, des conditions de travail difficiles,…).


Les actions montrent la solidarité

  • Samedi 22 septembre. La “Gazet van Antwerpen” publie un article sur la possible disparition de 300 emplois chez Bayer/Lanxess. Le journal dispose d’informations détaillées à ce sujet.
  • Lundi 24 septembre. La direction annonce un conseil d’entreprise spécial pour parler de ces rumeurs. Les syndicats distribuent un tract dans lequel ils exigent des clarifications de la part de la direction.
  • Mercredi 26 septembre. La direction dévoile ses plans : 379 emplois sont menacés. Les syndicats distribuent immédiatement un tract révélant les chiffres de bénéfices de l’entreprise ainsi que ceux de la productivité des travailleurs.
  • Vendredi 28 septembre. Les délégations syndicales organisent des rassemblements du personnel pour informer les travailleurs quant aux plans d’économies de la direction et appeler à la résistance.
  • Mardi 2 octobre. Les travailleurs organisent une journée d’action contre les attaques planifiées sur la sécurité. Ils mènent une action devant les bâtiments centraux de la société.
  • Vendredi 5 et lundi 8 octobre. Des assemblées syndicales sont organisées pour informer et mobiliser les travailleurs.
  • Lundi 15 octobre. Les travailleurs bloquent l’accès à l’entreprise avec des sous-traitants et des camions.
  • Mercredi 17 octobre. Suite au conseil d’entreprise spécial, le personnel organise une marche contre la politique de démolition sociale. Plus de 500 travailleurs se dirigent vers des entreprises voisines comme Degussa où les militants syndicaux ont manifesté leur solidarité. Lors du conseil d’entreprise spécial, la direction annoncent des ouvertures en ce qui concerne la sous-traitance et le personnel de la sécurité.
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