En route pour un nouveau plan d’action contre l’austérité !

GG2014_02Le premier plan d’action du front commun syndical de novembre/décembre avait ébranlé le gouvernement Michel, mais il en fallait plus pour le faire tomber. La prochaine étape prendra place le 11 mars à Bruxelles, où aura lieu une nouvelle concentration de militants à l’appel du front commun, à l’image de celle de fin septembre qui avait précédé la manifestation historique du 6 novembre. Un deuxième plan d’action offensif et allant crescendo est essentiel pour parvenir à balayer le gouvernement Michel et toute la politique d’austérité.

Par Nicolas Croes, article tiré de l’édition de mars de Lutte Socialiste

Une concertation sous forme de racket

Affiche_11marsÀ la période du plan d’action culminant avec la grève générale nationale du 15 décembre a suivi celle des négociations concernant la norme salariale entre ‘‘partenaires sociaux’’ au sein du ‘‘groupe des dix’’ (qui réunit les instances dirigeantes des organisations syndicales et patronales). Fin janvier, un projet d’accord a ainsi été conclu, prévoyant une hausse des allocations sociales de 2% et une marge salariale de 0,8%. Si la FGTB a quitté la table, la CSC, elle, y est restée, mais sa direction n’a su recueillir qu’une majorité particulièrement maigre en consultant ses structures. En prenant en compte les abstentions, il n’était même pas question de majorité… Un texte avalisé avec si peu d’approbation est inédit à la CSC. En considérant toute la pression qui a été exercée au sein du syndicat vert à grands coups de notes internes soulignant notamment que ce vote était distinct de l’élaboration d’un deuxième plan d’action (notamment contre le saut d’index), pareil résultat ne pouvait qu’illustrer l’écho dont bénéficie l’appel pour un deuxième plan d’action en front commun syndical.

Charles Michel (MR) et Kris Peeters (CD&V) ont voulu, à l’aide des médias dominants, dépeindre les choses autrement en mettant en avant qu’il s’agissait d’un pas important en direction de la paix sociale. Tout a été fait pour donner l’impression que rien ne c’était produit fin 2014, ou si peu, et que la CSC donnait soudainement un soutien plein et entier à l’accord de gouvernement. Le syndicat avait pourtant directement annoncé que le front commun n’était pas brisé et que de nouvelles actions allaient suivre.

Le secrétaire-général de la CNE (centrale des employés de la CSC) Felipe Van Keirsbilck a immédiatement prévenu dans l’émission Matin Première : ‘‘Personne ne croit, même Pieter Timmermans (l’administrateur-délégué de la FEB) dans ses rêves les plus fous, qu’il y aura la paix sociale sur tous les sujets.’’ La pension à 67 ans, le saut d’index, ‘‘la destruction des prépensions’’, le ‘‘vol important qui sera fait sur les travailleurs à temps partiel’’ ou ‘‘la destruction des droits des chômeurs âgés’’ sont autant de sujets sur lesquels la mobilisation sera importante. Il ajoutait : ‘‘Les négociations relevaient davantage du racket que de la concertation. Je mesure mes mots. Derrière la FEB, M. Timmermans et ses collègues savaient que le gouvernement était prêt à imposer une norme de 0% s’il n’y avait pas d’accord. Donc, ils étaient dans un fauteuil, ils n’ont pas négocié. Ils ont imposé toutes leurs volontés. Ils ont donné des cacahuètes.’’

Des cacahuètes pour tenter de museler l’opposition

Tout l’enjeu de cet accord social ne concernait pas la marge salariale, mais bien le blocage de la résistance aux politiques d’austérité. Les négociations ont été instrumentalisées dans le but de semer la division entre la CSC et la FGTB ou entre francophones et néerlandophones. Toutefois, malgré tout l’arsenal déployé à cet effet, la sauce n’a pas pris et la pression de la base a su contrarier la tentative. Mais avec les provocateurs professionnels de la N-VA, il n’était pas simple de masquer les objectifs réels du gouvernement et des patrons…

Puis, le projet d’accord était à peine annoncé que le ministre des Finances Johan Van Overtveldt (N-VA) expliquait à qui voulait l’entendre qu’il fallait d’abord examiner son impact sur le coût de la main-d’œuvre : ce projet ‘‘doit correspondre à l’accord de gouvernement dans une mesure suffisante.’’ Difficile d’expliquer plus clairement que les négociations ne sont bonnes qu’à servir les visées de ce gouvernement de droite dure en essayant de museler toute opposition à sa politique. Cela a d’ailleurs été dit de façon très explicite par la députée N-VA Zuhal Demir : ‘‘Le dialogue social livre un certain espace, utilisons-le.’’

Un certain espace ? C’est qu’aux dires du gouvernement, les fameuses cacahuètes seraient conditionnées à la garantie de la ‘‘stabilité des secteurs et des entreprises’’. ‘‘Les actions syndicales ne pourront être des grèves’’, a clamé Kris Peeters ; il ne pourra être question ‘‘d’hypothéquer le fonctionnement des entreprises.’’ Le député Egbert Lachaert (Open Vld) a renchéri : hors de question que le pays soit encore paralysé par le ‘‘diktat’’ et les ‘‘prises d’otage’’ des syndicats. Chacun y va de son petit mot, mais la ligne suivie par Michel & Co reste la même : hors de question que le mouvement des travailleurs s’oppose à la prise d’otage des services publics, des travailleurs, des allocataires sociaux, des retraités, etc. commise par le diktat du libre marché et de l’économie de concurrence.

Un deuxième round de résistance sociale

La concentration du front commun syndical du 11 mars sera précédée de sessions d’information dans les entreprises et d’actions de sensibilisation autour de ‘‘la fiscalité équitable et le tax shift, les mesures gouvernementales sur l’assurance-chômage, la disponibilité des chômeurs, la réforme des pensions, le pouvoir d’achat et le saut d’index, la défense de services publics de qualité et les négociations pour les travailleurs du secteur public et de l’enseignement.’’

En dépit du fait que la tension sociale construite par le premier plan d’action soit légèrement retombée et que le gouvernement a su utiliser la menace terroriste pour quelque peu resserrer les rangs autour de lui, la majorité de la population reste opposée aux principales mesures du gouvernement Michel. Un baromètre réalisé pour RTL et Le Soir, par l’agence Ipsos a démontré fin janvier que 58 % des sondés s’opposent au saut d’index (24% l’estimant positif) et que 61 % des personnes interrogées sont contre le recul de l’âge de la pension (contre 37% de partisans).

L’opposition reste donc vive, dans tout le pays. Ce qu’un nouveau plan d’action peut saisir comme potentiel est considérable. Nous avons développé à plusieurs reprises dans ses pages, et dès avant la journée de grève générale nationale du 15 décembre, ce que le PSL veut soumettre à la discussion en guise de prochain pas : un plan d’action plus dur et plus massif que le premier, avec une nouvelle concentration militante (étape dorénavant annoncée), une nouvelle manifestation nationale, des journées de grève régionales et enfin une grève générale nationale de 48 heures, éventuellement reconductible si le gouvernement n’est pas encore tombé.

Il est tout à fait possible de mobiliser l’enthousiasme qui vit chez bon nombre d’entre nous, avec l’annonce de nouvelles actions et au vu du fait que le front commun a tenu bon, en allant massivement distribuer des tracts aux marchés, dans les centres-ville, aux sorties des supermarchés,… Le mouvement organisé des travailleurs est capable de construire un mouvement social impliquant les couches larges de la population autour du noyau des syndicalistes les plus chevronnés. Ce serait une excellente manière de convaincre les sceptiques qui doutent de l’efficacité des actions collectives que nous nous rendons au combat pour vaincre. Cette approche serait renforcée par l’organisation d’assemblées de militants ouvertes – dans toutes les régions et dans tous les secteurs – pour décider des mesures à prendre, de la manière de les appliquer et des revendications à défendre.

Quelle alternative ?

Victor Hugo a écrit : ‘‘C’est de l’enfer des pauvres qu’est fait le paradis des riches.’’ Le scandale de LuxLeaks, puis de SwissLeaks, la grève des capitaux (‘‘Le cash des entreprises belges atteint 240 milliards d’euros’’, titrait le magazine Trends Tendances du 6 novembre 2014), etc. ont illustré à quel point ce constat est toujours valable.

Selon la très fade opposition officielle, il faut un rééquilibrage de la taxation du travail vers le capital. Il nous faut une ‘‘véritable révolution fiscale’’, disait la cheffe de groupe CDH au Parlement, Catherine Fonck, semblant faire écho à la proposition de (maigre) taxe sur la fortune du PS. Histoire d’aller au-delà des mots, le PS et le CDH pourraient se retrousser les manches : puisque l’impôt sur la fortune n’existe pas au niveau fédéral, la loi de financement autorise le gouvernement wallon à taxer les grosses fortunes wallonnes. Leurs efforts se bornent à tenter de récupérer la colère sociale.

Une véritable alternative issue du monde du travail peut émerger du mouvement anti-austérité. Le cahier de revendication du front commun doit être discuté et élaboré en Assemblées générales pour fournir un programme véritablement favorable aux travailleurs, tous secteurs confondus. Les moyens existent pour construire un autre modèle que la société capitaliste où s’épanouit la violence de la logique de concurrence et du chacun-pour-soi. Allons les arracher et bâtissons une alternative collective et solidaire.

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