Des gouvernements européens « modernisent » le droit de grève

Le droit de grève est remis en question dans plusieurs pays européens. Deux attaques récentes en France et en Allemagne sont particulièrement inquiétantes.

Peter Delsing

SERVICE MINIMUM ET INTERDICTION DE GRÈVE

En France, la majorité parlementaire de droite a approuvé cet été une loi qui risque d’affaiblir dangereusement les grèves dans les transports en commun. Les travailleurs grévistes devront « s’annoncer » à la direction 48 heures avant le début de l’action. Ceci donne évidemment d’énormes possibilités aux patrons pour intimider les grévistes et permet aussi au gouvernement d’organiser plus facilement un service minimum. Bref, tout est fait à l’avance pour casser les futures grèves. Sarkozy et Fillon prévoient aussi un vote obligatoire – organisé à des conditions qui peuvent être fixées par la direction – au cours de la grève pour déterminer si celle-ci doit continuer ou pas. Et le gouvernement français a déjà laissé transparaître qu’au-delà des transports en commun, la nouvelle loi pourrait aussi s’étendre à l’enseignement ainsi qu’à tout le secteur privé.

Des grévistes qui doivent « s’annoncer » à leur direction, des « sanctions » lorsque cela ne se fait pas, des votes organisés non pas par les membres des syndicats mais par la direction de l’entreprise… : il semble que les patrons et leurs politiciens veulent remonter la pendule des droits sociaux de plus de cent ans !

En Allemagne, le tribunal de Nüremberg a décidé, début août, d’interdire au syndicat des machinistes GDL de lancer une grève quelques jours plus tard. Ce même « juge impartial » a pu aussi décidé que cette interdiction restait valable jusqu’à la fin septembre. La force de frappe des syndicats allemands a été fortement affaiblie par la tendance à « décentraliser » la concertation sociale du niveau national au niveau des régions et des entreprises. Ceci a contribué à une baisse du pouvoir d’achat de la classe ouvrière allemande et à un net recul du nombre de syndiqués.

Ainsi, l’Etat essaie d’affaiblir la lutte des travailleurs en les divisant et, lorsque certaines sections combattives des syndicats passent quand même à l’action, on leur reproche, comme en Allemagne avec le GDL, de ne pas être « représentatifs ».

LE DROIT DE GRÈVE GÊNE LA POLITIQUE NÉO-LIBÉRALE

Les attaques contre le droit de grève ne sont pas un hasard. Nous sortons d’une période de croissance économique qui a pourtant amené aux travailleurs bien des fruits amers (davantage de flexibilité, moins de pouvoir d’achat, plus d’exploitation,…). Dans une situation où une nouvelle crise ou une récession économique est possible, le « filet de la sécurité sociale » sera de moins en moins efficace pour protéger les travailleurs. Les patrons pourraient bien se heurter à nouveau à une opposition plus large et plus déterminée.

A l’heure actuelle, aucun gouvernement n’est certain de disposer d’un soutien durable dans la population, même pas ceux de Sarkozy et de Merkel. La bourgeoisie ressent cette instabilité et prépare donc ses armes pour étouffer la résistance des travailleurs. Et l’arrogance des patrons et de leurs représentants se nourrit du manque de réaction des dirigeants syndicaux.

Ces tentatives de saper le droit de grève sont un test important. Les travailleurs ont dû lutter pour chaque droit démocratique et social qu’ils ont conquis. Ils devront encore le faire pour les conserver et briser la spirale vers le bas qu’on veut nous imposer.

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