Journée internationale pour le droit de grève : "Ne touchez pas au droit de grève!"

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Notre droit de nous battre pour de meilleures conditions de vie mit sous pression !

Au sein de l’Organisation Internationale du Travail (qui a une composition tripartite réunissant des groupes représentants des travailleurs, des patrons et des gouvernements) et de son organe exécutif (le Bureau International du Travail), le groupe patronal a lancé une attaque contre le droit de grève, un droit fondamental pour les travailleurs. En novembre dernier, le Conseil d’Administration du Bureau International du Travail a ainsi été empêché de saisir la Cour de Justice Internationale de La Haye à propos du différend qui oppose les employeurs et les travailleurs sur le droit de grève, comme le prévoit pourtant la Constitution de l’OIT. Il s’agit d’une grave remise en question du droit de grève.

La Confédération Syndicale Internationale (CSI) a donc lancé une campagne internationale pour la défense du droit de grève, symbolisée par cette journée d’action internationale, sous le slogan : « Ne touchez pas au droit de grève ». La CSI a dénoncé dans un courrier à destination de ses membres que le patronat vise, partout à travers le monde, à « saper le droit de grève » et « aggraver pour toujours le rapport de force sur le lieu de travail et dans la société ». Le droit de grève est remis en question au travers de la Convention 87 de l’OIT et puisque ces conventions ont valeur de traités internationaux, elles engagent les Etats à mettre leur législation en conformité avec le droit international. Pour la CSI, le patronat tente depuis 2012 déjà de s’attaquer au droit de grève au sein de l’OIT (alors que la reconnaissance juridique de ce droit existe depuis plus de 50 ans). Une fois ce droit défait au niveau international, il serait dès lors juridiquement plus facile aux groupes employeurs de démanteler les lois nationales relatives au droit de grève.

Parallèlement, des traités internationaux tels que le très toxique Traité transatlantique (TTIP) ont notamment pour but d’inféoder l’ensemble des droits arrachés par les travailleurs aux intérêts économiques du monde du capital en se basant sous l’argumentation dangereuse selon laquelle une législation environnementale ou sociale serait une atteinte à la libre concurrence et au « marché libre ».

Cette offensive patronale ne surgit bien évidemment pas par hasard. Si l’élite capitaliste essaye de limiter le droit à l’action collective, cela démontre simplement qu’elle est bien consciente de la gravité de la situation de la crise économique capitaliste tout autant que de la faiblesse de sa position face à la force collective des travailleurs. A très juste titre. Comme l’expliquait le dirigeant syndical irlandais James Larkin : « Les grands de ce monde n’ont l’air grands que parce que nous sommes à genoux. Levons-nous! » C’est ce que craignent le plus les partisans du système capitaliste.

Les libertés syndicales bafouées

Les atteintes à la liberté de mener des actions collectives sont nombreuses à travers le monde. En 2011, la CSI avait publié un rapport détaillé sur l’état des libertés et des droits syndicaux. Cette année-là, au moins 76 syndicalistes avaient été assassinés à cause de leurs activités syndicales, dont 29 uniquement en Colombie (en 2013, 26 syndicalistes avaient encore été tués dans le pays). Les 25 années ayant précédé ce rapport, au moins 2.914 syndicalistes avaient été tués, et encore ce chiffre doit il être considéré comme un minimum puisque les grévistes du secteur du pétrole massacrés au Kazakhstan en 2011 ne figuraient par exemple pas dans le document. Les lecteurs régulier de ce site se rappelleront de la couverture que nous avions consacré à l’époque à ces tragiques événements, de même qu’à la sanglante répression qui a frappé les mineurs sud-africains en grève à Marikana, en Afrique du Sud, en 2012.

En Europe, la crise capitaliste et l’imposition de mesures d’austérité drastiques ont été synonymes de répression accrue des mobilisations sociales, et particulièrement syndicales. En Espagne, en Grèce, au Portugal et ailleurs, de nombreux syndicalistes ont été appelés devant les tribunaux pour le « crime » d’avoir voulu défendre des conquêtes sociales durement arrachées par les générations précédentes.

L’année 2015 ne sera pas une exception, nous pouvons déjà en être certains. En Turquie, les ouvriers métallos sont partis en grève le 29 janvier dernier pour défendre leur convention collective de travail, notamment concernant le salaire des jeunes. Leur action vient d’être déclarée illégale. Un tribunal a également récemment déclaré illégale la grève des mineurs de Jastrz?bska Spó?ka W?glowa en Pologne.

La Belgique n’est pas épargnée

Tant la CSI que les syndicats belges dénoncent depuis longtemps que la protection des droits syndicaux fait défaut dans notre pays. En 2011, le rapport de la CSI constatait qu’au moins 10 délégués avaient été licenciés en raison de leurs activités syndicales. Les autorités et les patrons tentent d’autre part de réprimer les actions collectives et le droit de mener des actions collectives, notamment en faisant usage de requêtes unilatérales contre les piquets de grève.

La vitesse supérieure a été enclenchée avec l’arrivée au pouvoir de l’actuel gouvernement fédéral de droite dure. Lorsque l’on demandait à l’époque à la présidente de l’Open-VLD, Gwendolyn Rutten, si le gouvernement était prêt à négocier avec les syndicats concernant les attaques prévues par le gouvernement, elle répondait que rien n’était pas discutable. « Nous sommes, en effet, élus par des gens qui ne lancent pas de pierres et qui n’organisent pas de grève sauvage ». Cette arrogance largement présente dans les sphères de droite a reçu quelques coups à la suite du premier plan d’action du front commun syndical, mais elle reste encore bien présente. L’imposition d’un service minimum dans divers services publics reste par exemple toujours dans les projets de la coalition MR/CD&V/Opel VLD/N-VA.

Dans le cadre des actions du plan d’action de novembre/décembre, le directeur général de la Fédération des Entreprises Belges (FEB) Bart Buysse avait déclaré que « la FEB demande une évaluation et une révision des règles actuelles relatives au droit de grève » en justifiant : « ce droit n’est pas absolu. Il est indispensable de disposer d’un cadre légal pour le droit de grève, assorti de conditions, limitations et procédures claires. (…) Nous devons examiner comment grévistes et syndicats peuvent être davantage responsabilisés à cet égard. » Pour les patrons, le droit de protester n’est pas un problème, c’est certains, c’est surtout le fait que ce droit puisse être efficace qui les dérange…

Le droit de grève et de mener des actions collectives est toujours bien d’actualité, très certainement au vu des attaques antisociales qui nous pleuvent dessus et de ce que les partisans du capitalisme ont encore en réserve pour nous faire payer une crise dont ils sont les seuls responsables. Il nous faut riposter avec audace et énergie.

L’annonce d’un deuxième plan d’action en front commun syndical qui commencera par une concentration syndicale le 11 mars prochain, à 11 heures, à la Place de la Monnaie à Bruxelles représente une bonne étape dans cette direction. Un bon plan d’action offensif qui indique clairement que la lutte sera menée pour l’emporter pourra exercer une grande attraction et ainsi permettre d’organiser activement le large soutien dont dispose l’opposition anti-austéritaire. La meilleure manière de défendre nos droits syndicaux, c’est de répondre en en faisant usage !

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Première page de Lutte Socialiste