En décembre dernier, les Indiens du Brésil ont remporté une victoire historique en empêchant le Congrès brésilien de prendre le contrôle de leurs terres et de leur avenir. Une proposition visant à modifier la Constitution afin de donner au Congrès le pouvoir de délimiter les territoires indigènes a été rejetée après des mois de protestations véhémentes de milliers d’Indiens représentant des dizaines de tribus.
Plusieurs d’entre eux avaient pénétré dans le bâtiment du Congrès pour faire entendre leur voix. Cinq d’entre eux qui avaient été arrêtés de cette manifestation ont été libérés par la suite. La lutte pour une amazonie libre sans pression des lobby agroalimentaires continue !
Voici ci-dessous la lettre adressée à l’opinion nationale et internationale par les représentants du peuple et des organisations indigènes de toutes les régions du Brésil, disponible sur le site du PSOL (parti de gauche large dans lequel travaillent nos camarades brésiliens de Liberdade Socialismo e Revolução).
Environ 240 tribus vivent aujourd’hui au Brésil, soit environ 900.000 personnes (0,4% de la population). Le gouvernement a reconnu 690 territoires indigènes qui couvrent environ 13% de la superficie du Brésil. 98,5%, soit la presque totalité de ces territoires, se trouvent en Amazonie.Cependant, si près de la moitié de la population indienne du Brésil vit en dehors de l’Amazonie, celle-ci n’occupe que 1,5% des territoires indigènes qui leur sont réservés.
Les Indiens qui vivent dans les savanes et les forêts atlantiques du sud, tels les Guaranis ou les Kaingangs et dans l’intérieur aride du nord-est, tels les Pataxo Hã Hã Hãe ou les Tupinambá, ont été parmi les premiers à entrer en contact avec les colonisateurs européens à leur arrivée au Brésil, en 1500. En dépit de centaines d’années de contact conflictuels avec les colonisateurs, de la spoliation et de l’empiétement constant de leurs terres, ils ont, dans la plupart des cas, farouchement conservé leurs langues et maintenu leurs coutumes et leur identité.
La tribu la plus nombreuse aujourd’hui au Brésil, les Guaranis, qui sont 51.000, est quasiment privée de terres. Au cours des cent dernières années, la presque totalité de leur territoire a été spoliée et transformée en vastes pâturages d’élevage, en plantations de soja et de de canne à sucre. De nombreuses communautés sont entassées dans des réserves surpeuplées, d’autres vivent sous des bâches au bord des routes. Le groupe qui occupe le plus vaste territoire est celui des Yanomami, une tribu relativement isolée forte de 19.000 membres qui occupe 9,4 millions d’hectares au nord de l’Amazonie, une superficie légèrement plus grande que celle de la Hongrie. La tribu amazonienne la plus nombreuse est celle des Tikuna, forte de 40.000 membres. La plus petite ne compte qu’un seul individu, un homme qui vit en Amazonie occidentale sur une toute petite parcelle de forêt cernée par des fermes d’élevage et de plantations de soja, et qui refuse toute tentative de contact.
La population de nombreux groupes amazoniens n’atteint pas un millier d’individus. Les Akuntsu, par exemple, ne sont que 5 et les Awá seulement 450.
Protestation contre la suppression des droits et tentatives d’en finir avec les peuples indigènes du Brésil :
« Nous, dirigeants du peuple et des organisations indigènes de toutes les régions du Brésil, réunis à Brasilia (département national), pour manifester notre refus du processus de suppression de nos droits fondamentaux, collectif et d’organisation, refusons le vote de différentes organisations du Brésil notamment celle du Congrès républicain, avec la connivence et la conscience du pouvoir exécutif et du pouvoir judiciaire, nous venons à Brasilia pour dénoncer devant l’opinion nationale publique et internationale :
1. L’oppression des forces de polices et des forces nationales qui veulent interdire notre accès au congrès national qui est normalement considérée comme le représentant du peuple, agissent contre un état de droit, un régime démocratique, avec abus d’autorité, réprimant, usant de l’intimidation, de la menace et de la détention arbitraire nos parents et camarades, comme cela s’est passé mercredi dernier (le 16 décembre, NDT), quand la police militaire a empêché l’accès principal au ministère de la justice à quatre de nos organisateurs et d’autres lorsque nous sommes retournés à l’espace ou nous résidons pendant la manifestation.
2. Les agriculteurs, en majorité érigés en envahisseurs de notre territoire aujourd’hui appelé Brésil et des autres de nos camarades en période de dictature, veulent supprimer notre droit constitutionnel fédéral de 1988 de manière ferme et définitive, légalisant l’usurpation, la destruction et l’exploitation qui vient envahir le peu de terre que nous gardons depuis 514 années d’invasion.
3. Les agriculteurs, beaucoup d’entre étant financés par des grandes entreprises agroalimentaires, de réfrigération et de l’industrie militaire, entre autres, veulent tout faire, depuis 2001, pour modifier, conformément à leurs intérêts, le texte constitutionnels qui garantit nos droits, au milieu d’initiatives de proposition d’amendements constitutionnels. L’amendement 215 de l’année 2000, la loi sans numéro arrogée par le sénateur Romero Jucà qui altère l’article 231, paragraphe 6, l’amendement 237 qui traite de la parcellisation des terres indigènes et le projet de loi complémentaire 227, qui fut proposée par un sénateur.
4. Le gouvernement de la présidente Dilma, s’est lui-même déclaré contre l’amendement 215, peu est fait pour contrer cette offensive terrifiante, qui à ce moment même se configure comme une planification d’un génocide, de l’extermination de nos peuples, de fait comme son singulier silence pour montrer que nos territoires seront parcellisés et supprimés, la sollicitude d’une « carte des peuples indigènes du Brésil », publiée par cette même candidate aux dernières élections, affirme « nos progrès, particulièrement à la démarcation des terres indigènes, en modifiant les textes de notre constitution ».
5. Des déclarations de cette nature sont multiples alors que le gouvernement omet d’orienter son droit de véto pour contrer les attaques systématiques des droits indigènes du congrès national et quand il prend la détermination de suspendre le processus de démarcation des terres indigènes, de fait, ainsi il parait concorder aux objectifs des agriculteurs d’envahir, d’exploiter et de mercantiliser nos territoires et ses richesses, pour en même temps interférer notre processus de démarcation des zones indigènes, rouvrir le processus et empêcher totalement notre processus de démarcation. À aucun moment la présidente Dilma ne dira à notre peuple indigène ce qu’elle a dit à la confédération nationale d’agriculture (CNA) à sa présidente du sénat Katia Abreu : « je veux la CNA de mon côté… Je propose plus que cela. Je veux que le producteur agricole prenne des décisions avec moi, participant au gouvernement et actualisant la définition de nouvelles politiques légales ». Tout ceci pour une entité qui considère nos peuples indigènes comme « désintéressé ».
6. Dans ce cadre de menaces et d’attaques, nous réaffirmons notre détermination à continuer de lutter pour défendre nos droits, pour lesquels nous espérons contre l’opposition d’autres mouvements et organisations sociales et de l’opinion publique nationale et internationale, nous exigeons de l’état brésilien qu’il arroge les revendications suivantes :
– La démarcation des terres indigènes avec la dotation d’une loi nécessaire. Il y a en effet un passif de 60% de zones qui ne sont pas démarquées et légiférées.
– La protection contre la fiscalisation et la destruction des terres indigènes, sécurisant les conditions d’autonomie de nos peuples.
– Empêcher les initiatives légales qui cherchent à supprimer les droits indigènes par la constitution fédérale, à la place d’un agenda positif.
– L’abrogation d’un projet de loi et de mise en œuvre au conseil national de politique indigène, une instance délibérative, normative et articulée autour de politiques et d’actions d’information aux différents districts et départements du gouvernement.
– L’application de la convention 169 sur les peuples indigènes et tribaux en pays indépendants de l’organisation internationale du travail, dans toutes les législations qui nous concernent.
– L’implémentation effective du sous-système de santé indigène, au travers du renforcement du secrétariat de la santé indigène pour superviser les cas d’abandon et de continuité du système de santé.
– La garantie à l’accès à une éducation de qualité spéciale et différenciée en terre indigène ou proche de celle-ci.
– Garantir à la participation des indigène au conseil national de la culture et la création d’une instance spéciale pour arroger les demande de nos cultures.
– Un compromis contre la fin de la criminalisation le meurtre et la prison arbitraire d’organisateur et représentants indigènes qui luttent pour la défense des droits territoriaux de ces dits peuples. De fait, nous exigeons la fin immédiate de la réclusion de nos représentants qui furent emprisonnés en luttant contre la législation numéro 215 de la constitution.