Salaires et pensions en ligne de mire…

Les Thatcher belges en action…

pensions_imageOn les redoutait : les mesures du gouvernement Michel Ier à l’encontre des travailleurs vont au-delà de nos pires craintes ! Un menu indigeste d’austérité pour nous, des cadeaux comme s’il en pleuvait pour le patronat. Les efforts sont donc, à nouveau, demandés à ceux qui ont déjà été largement mis à contribution par le gouvernement précédent qui nous a imposé des mesures d’austérité à hauteur de plus de 22 milliards d’euros auxquels vont s’ajouter les 11,237 milliards d’économie de la législature qui démarre. Voici un aperçu des mesures concoctées par la ‘‘suédoise’’ qui constituent des attaques en règle contre notre système de négociation collective et le principe de solidarité sur lequel notre système de protection sociale est basé. Le détricotage de nos acquis se poursuit…

Par Maud (Bruxelles), article tiré de l’édition de novembre de Lutte Socialiste

TRAVAILLER PLUS POUR GAGNER MOINS

En 2015, un saut d’index est prévu qui représentera une perte de pouvoir d’achat de 2 % qui se répercute sur toute la carrière par effet cumulatif et qui, selon une étude du Bureau du Plan de 2011, pourrait détruire 15.600 emplois.

Une nouvelle manipulation de l’index est à craindre (‘‘réformer davantage’’) alors que l’augmentation des accises sur le tabac, le diesel et les boissons alcoolisées ne sera pas répercutée sur l’évolution des salaires et les allocations sociales puisque ces produits ne font pas partie de l’indice-santé.

Il n’est guère question de négociation collective, le gouvernement veut unilatéralement s’en prendre à nos salaires et conditions de travail. Quelques éléments centraux :

1) Modération salariale. L’objectif du gouvernement est de supprimer le ‘‘handicap’’ salarial cumulé depuis 1996 d’ici 2019. Pour cela, il y aura poursuite de la modération salariale déjà mise en place sous le gouvernement précédent. Cela place les négociations interprofessionnelles et sectorielles dans un carcan. Un contrôle des conventions collectives de travail par le Ministère de l’Emploi et du Travail fera en sorte que la norme soit bien respectée. Désormais, l’évolution salariale sera observée sur les deux années à venir et sur les deux années précédentes dans les pays voisins (France, Allemagne, Pays-Bas) et des mécanismes de correction automatiques entreront en action et ce, sans concertation sociale.

2) L’évolution barémique se fera sur base de la compétence et de la productivité et non plus sur base de l’ancienneté.  Ceci mettra davantage de pression sur les travailleurs qui seront soumis à l’arbitraire de l’employeur. Cela décentralise aussi la négociation collective. L’argument du gouvernement en la matière est le coût élevé des travailleurs âgés.

3) La procédure Renault sera raccourcie. Cette procédure permet la négociation d’un plan social en cas de restructuration d’entreprise. La réduction de cette procédure laissera moins d’espace pour négocier des alternatives aux licenciements.

4) Flexibilité accrue du temps de travail par l’annualisation du temps de travail. Le temps de travail sera calculé sur une base annuelle pour permettre plus de flexibilité, pour travailler plus sans aucune compensation, si c’est nécessaire pour l’entreprise. Toujours sans concertation sociale.

5) Instauration d’un compte carrière. Instauration d’un compte carrière qui individualise la façon de gérer sa carrière et risque de mettre à mal notre système de congés annuels conquis de haute lutte. Le principe étant de ‘‘capitaliser’’ des congés, heures supplémentaires voire le renoncement à certaines primes afin de pouvoir aménager sa fin de carrière ou une éventuelle interruption de carrière. Les crédits-temps de fin de carrière (longues carrières, métiers lourds, entreprises en difficulté) et le crédit-temps sans motif disparaissant quant à eux.

La flexibilité et la pression sur les salaires et les conditions de travail seront également renforcées dans d’autres domaines.

Flexibilité accrue dans l’horeca. Il sera possible d’accumuler 250 heures supplémentaires par travailleur sans qu’un repos compensatoire ne soit nécessaire et avec un régime fiscal avantageux. Ce secteur sera renforcé en tant que secteur à bas salaire.

Travail étudiant. Le travail étudiant sera désormais calculé en heures et non plus en journées, afin de permettre aux étudiants de travailler plus.

Service à la communauté pour les chômeurs de longue durée. A la place d’emplois décents avec de bons contrats de travail et de bons statuts, le gouvernement fédéral veut imposer un travail d’intérêt général de deux demi-journées pour les chômeurs de longue durée. Du travail forcé à la place d’un emploi décent.

TRAVAILLER PLUS LONGTEMPS POUR DE PLUS PETITES PENSIONS

La mesure qui ne figurait dans aucun programme des partis constituant le gouvernement et qui fait grand bruit est bien évidemment l’allongement des carrières et le fait qu’il nous faudra travailler de deux à cinq ans de plus ans selon les cas. Il est intéressant à cet égard de consulter la carte interactive du Soir (7 octobre 2014) reprenant l’âge de la retraite en Europe dont il ressort que nous sommes désormais l’un des pays où l’âge de la retraite est le plus haut. Outre le relèvement de l’âge de la pension à 67 ans, des pensions anticipées et de la prépension (RCC) menant à la suppression progressive de ce système, le montant-même des pensions de retraite sera réduit par une série de mesures.

En effet, plusieurs compléments à la pension légale vont être supprimés. Le bonus pension octroyé aux travailleurs qui restent au travail au-delà de 63 ans ou de 44 années de carrière, déjà restreint sous le gouvernement précédent, sera supprimé. La pension au taux ménage accordée au travailleur avec un conjoint à charge qui n’a pas pu constituer suffisamment de droits à la pension, sera supprimée aussi.

Au niveau des services publics, l’objectif est un alignement sur la pension légale du secteur privé. Ceci entraîne diverses restrictions :
–     suppression de la bonification liée au diplôme, c’est-à-dire la prise en compte des années d’étude pour le calcul de la carrière
–    années comme contractuel ne seront plus prises en compte pour le calcul de la carrière
–    généralisation des tantièmes à 60 (dénominateur par lequel on divise le nombre d’années de carrière pour le calcul de la pension)
–    prise en compte du salaire moyen plutôt que du salaire des dernières années.

En résumé, concernant le relèvement de l’âge de la pension légale : 65 ans jusqu’en 2024, 66 ans entre 2025 et 2029 et 67 ans en 2030 avec des conditions de carrière plus sévères.
–    La pension anticipée passe de 62 à 63 ans moyennant une carrière de 42 ans en 2019.
–    La pension de survie sera relevée de 5 ans. Elle passe de 45 à 50 ans entre 2015 et 2025.
–    Plusieurs périodes assimilées dont les périodes de crédit-temps sans motif seront supprimées.
–    Instauration d’un système à points par lequel il n’y aura plus aucune garantie quant au montant de la pension qui variera en fonction des contraintes budgétaires et de l’espérance de vie. Les pensionnés ne seront fixés que trois ans à l’avance sur le montant de la retraite dont ils bénéficieront.
–    Les pensionnés âgés de 65 ans et comptant 42 ans de passé professionnel peuvent continuer à travailler de manière illimitée.

On se demande où est la logique quand on a autant de jeunes au chômage.

TRAVAILLER JUSQU’A TOMBER RAIDE

Cette augmentation de la flexibilité causera de nombreux problèmes en termes de stress, de burn-out,… Mais les patrons ne veulent pas voir ces conséquences de leur avidité, c’est à la collectivité d’en supporter le coût. La proposition du gouvernement d’obliger les employeurs d’assurer le payement de deux mois de salaire en cas d’incapacité de travail a été reportée d’un an après la première protestation du camp patronal. Ne faut-il pas craindre que les employeurs soient tentés de faire pression sur les travailleurs pour un retour prématuré au travail et que des contrôles intensifiés des incapacités de travail ne prennent place ?

Les travailleurs en incapacité de travail seront désormais contraints de suivre des formations pendant leur incapacité et se verront appliquer un plan de réinsertion sur le marché du travail dès trois mois d’incapacité. L’octroi des indemnités INAMI deviendra aussi plus sévère.

RÉSISTANCE !

Face à cette déferlante de mesures antisociales, une lutte unifiée des travailleurs, allocataires et jeunes sera indispensable. Le plan d’actions prévu par le front commun syndical est un bon cadre dans lequel organiser la résistance. A nous d’en faire bon usage pour la construction d’un mouvement large qui, au-delà de la grève générale du 15 décembre, nous permettra de remettre en question le système.

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