Hausse des frais d’inscription dans l’enseignement supérieur ?

Dans son nouveau rapport sur la Belgique, l’OCDE plaide pour une hausse des frais d’inscription dans l’enseignement supérieur. Cette opération drastique aurait deux ‘avantages’ considérables. D’un côté, l’enseignement supérieur aurait plus de moyens et, de l’autre, les institutions d’enseignement supérieur pourraient exacerber la concurrence. « Il est important », écrit le rapport, « que les frais soient augmentés substantiellement pour qu’ils puissent devenir une source de financement importante de l’enseignement supérieur ».

Stefanie Lagae

L’enseignement devient un ‘marché’

Ce n’est pas un hasard si cette idée est lancée maintenant. D’ici 2012, le paysage de l’enseignement européen doit être adapté à l’économie de marché, un objectif déjà avancé dans les accords de Bologne. Ceux-ci ont été signés en 1999 par tous les ministres de l’enseignement en Europe et visent la transformation de nos universités sur le modèle anglo-saxon afin de les préparer à la concurrence au niveau européen et international.

Le plan Vandenbroecke pour l’enseignement flamand, contre lequel des milliers d’étudiants protestent, n’est rien d’autre que la partie financière de ces réformes. Sous cette pression, les institutions devront dorénavant se concurrencer pour décrocher une partie du budget gouvernemental. Ce budget n’est pas encore fixé d’ici 2012, mais devra progressivement céder la place au capital privé : des entreprises, ou les étudiants eux-mêmes.

Si nous partageons le constat de l’OCDE sur le manque de moyens pour l’enseignement, nous ne sommes pas d’accord avec les objectifs mis en avant par cette organisation. Nous sommes en faveur de plus de moyens publics. Depuis 25 ans, la part de l’enseignement dans le budget a baissé systématiquement. Alors que 7% du PIB étaient dépensés pour l’enseignement en 1980, ce n’était déjà plus que 4,9% en 2005. Les coûts liés aux études ont augmenté en moyenne de 40% à 60% entre 1986 et 1999.

Accès démocratique en danger

Plus de la moitié des étudiants travaillent afin de financer leurs études. Selon certaines enquêtes, des étudiants salariés ont 40% de chances en moins de réussir. Une augmentation des frais d’inscription rendra l’accès à l’enseignement supérieur encore plus difficile pour beaucoup de jeunes. L’enseignement supérieur ne doit pas devenir un privilège des familles aisées qui ont suffisamment de moyens, mais doit au contraire devenir accessible à tous et à toutes.

En Grande-Bretagne, les étudiants paient jusqu’à 6.000 euros pour s’inscrire à une université. La logique sous-jacente est que les étudiants décrocheront ainsi un diplôme avec lequel ils accèderont plus facilement à une belle carrière avec un salaire élevé. Les étudiants peuvent aussi demander un prêt sans intérêt qu’ils devront rembourser dès que leur revenu annuel s’élève à plus de 22.500 euros.

Cela aura pour conséquence que beaucoup d’étudiants termineront leurs études avec une dette de plus de 30.000 euros, avant même d’avoir trouvé un premier emploi ! 70% des étudiants anglais travaillent à mi-temps tout au long de leurs études. Une autre conséquence de cette politique, c’est l’augmentation de la prostitution des étudiantes. Dans ce ‘secteur’, les étudiantes peuvent gagner rapidement beaucoup d’argent, ce qui leur laisse plus de temps pour étudier. Depuis 2000, on constate une hausse de 50% du nombre d’étudiantes qui subviennent à leurs besoins de cette façon. C’est ça la perspective que nos politiciens ont à offrir aux étudiants de demain ?

Que feront ‘nos’ ministres de l’enseignement ?

Les ministres flamand et francophone de l’enseignement supérieur, Frank Vandenbroucke et Marie-Dominique Simonet, ont réagi de façon mitigée aux propositions de l’OCDE. Les élections sont en vue. Il est pourtant clair que tous les partis traditionnels se retrouvent entièrement dans la logique néolibérale de l’OCDE.

Du côté francophone, Marie-Dominique Simonet a interdit les ‘droits d’inscription complémentaires’ (DIC) dans les hautes écoles, mais cette interdiction ne sera pleinement effective… que d’ici 10 ans ! En revanche, elle a légalisé les ‘droits administratifs complémentaires’ (DAC). Même si le minerval augmenté des DIC et des DAC ne pourra plus dépasser les 778 euros, ça reste un montant élevé pour les étudiants des hautes écoles. En effet, il correspond au minerval en vigueur à l’université. Or, les étudiants des hautes écoles proviennent généralement de milieux plus défavorisés que ceux des universités.

Les représentants étudiants officiels du VVS ou de la FEF s’opposent à toute hausse des frais d’inscription. Nous saluons toutes les actions contre de telles hausses. Pour cela, il faut une opposition aux partis traditionnels et la construction d’un parti combatif qui défende les intérêts des jeunes et du personnel. Le CAP peut devenir un tel instrument.

Dans cette optique, les Etudiants de Gauche Actifs (EGA-ALS) ont décidé de faire une coalition avec le CAP lors des élections pour le conseil étudiant à la VUB. Nous sommes convaincus que seules nos luttes peuvent mettre un terme aux hausses des frais d’inscription. Le budget de l’enseignement doit être relevé à 7% du PIB. L’enseignement est un droit, pas une marchandise !

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