Vénézuela. Où est la voie vers le socialisme?

Au Vénézuela, chaque coin de rue est témoin de discussions enthousiastes sur la manière d’avancer vers le socialisme. Parmi les masses vénézuéliennes, une haine formidable contre le néolibéralisme et à l’impérialisme mène à la recherche d’alternatives. Chavez vient de se dire « trotskiste » et partisan de la théorie de la révolution permanente. Il appelle cependant dans la foulée les capitalistes vénézuéliens à soutenir la révolution…

Luc Janssens

Marge pour les concessions

Lors de sa prestation de serment après sa réélection en décembre dernier, Chavez ne s’est pas seulement déclaré trotskiste. Il a également annoncé la possibilité de nationaliser des secteurs-clés de l’économie, dont la plus grande société d’électricité privée, Electricidad de Caracas, et l’entreprise de télécommunication CANTV. Il a aussi avancé la nécessité de la création d’un « parti socialiste unifié du Vénézuela”, afin de réunir les forces de la révolution.

Grâce aux prix élevés atteints par le pétrole ces dernières années, Chavez a disposé d’une marge de manoeuvre pour introduire des réformes progressistes comme les programmes d’aide aux plus pauvres, entre autres dans l’enseignement, les soins de santé et l’alimentation. Cependant, 25 % de la population vit toujours avec moins d’un dollar par jour, tandis que les 10 % les plus riches représentent 50 % du revenu national.

C’est la pression des masses vénézuéliennes qui a forcé Chavez à introduire cette série de mesures. Il parle régulièrement de la nationalisation des secteurs-clés, mais les paroles sont plus radicales que les actes. De même, dans le secteur pétrolier, si 84 % des bénéfices allaient avant au secteur privé, celui-ci en conserve encore toujours actuellement 70%. Les contrats pour les multinationales sont plus sévères, mais elles continuent à empocher la majeure partie des bénéfices au détriment de la collectivité.

La base veut aller plus loin

L’entreprise de télécom CANTV figure en haut de la liste des entreprises à exproprier et à nationaliser. Depuis plusieurs mois, une lutte très énergique se développe dans cette entreprise où les travailleurs exigent la nationalisation sous contrôle ouvrier. Des luttes similaires se déroulent ailleurs.

L’enthousiasme pour les réformes de Chavez est très grand parmi de larges couches de la société. Mais il existe également une méfiance face à la bureaucratie qui domine le mouvement « chaviste » et qui s’enrichit sur base de la corruption. C’est sur base de ce constat que Chavez avait déclaré qu’il fallait un Parti Socialiste Unifié (PSUV) qui puisse être construit d’en bas avec des structures démocratiques. Mais les discussions semblent plutôt se restreindre à une couche supérieure sans la participation active des masses.

Parti Socialiste Unifié?

Chavez a mis sur pied un comité visant à promouvoir ce parti parmi les travailleurs et dans les quartiers les plus pauvres. Mais trois des petits partis pro-Chavez ont refusé de se dissoudre au sein du PSUV, ce qui a été un premier camouflet pour Chavez. Parmi les forces plus importantes, à côté des deux partis plus à droite au sein du camp de Chavez, le parti communiste ( PCV) a, lui aussi, décidé de ne pas se dissoudre au sein du PSUV. La possibilité qu’une participation active de la base et une vie démocratique se développent dans le nouveau parti est encore incertaine.

Rompre avec le capitalisme

Les concessions du gouvernement vénézuélien aux plus pauvres sont des mesures importantes qui montrent le chemin à suivre. Mais afin de sauvegarder ces mesures progressistes, il faudra une rupture avec le capitalisme. Sinon, l’espace sera laissé au développement de la contre-révolution.

Chavez et son régime « bolivarien » soulèvent des espoirs gigantesques, pas seulement au Venezuela d’ailleurs, mais pour l’ensemble du continent sud-américain et à travers le monde. Lors de sa récente tournée en Amérique Latine, Bush s’est partout heurté aux protestations tandis que Chavez a pu jouir d’une adhésion toujours plus importante dans sa tournée, entre autres lors de sa visite en Argentine.

Les masses connaissent la différence entre Bush, le guerrier impérialiste, et Chavez qui a introduit une série de mesures pour les travailleurs et le peuple. La bourgeoisie, en revanche, a peur de l’exemple vénézuélien et de la radicalisation qui peut pousser le régime encore plus loin. L’élite vénézuélienne, avec le soutien de l’impérialisme américain, essaiera d’annuler les réformes et de rétablir son contrôle total sur la société.

Plusieurs fois déjà, les masses vénézuéliennes se sont révoltées contre la bourgeoisie, notamment durant le coup d’Etat soutenu par les Etats-Unis. Mais si une rupture avec le capitalisme ne survient pas, il y aura de nouvelles tentatives pour rétablir la situation antérieure.

Face à cela, la participation active et massive des travailleurs et des pauvres au débat politique est un élément crucial. Les masses auront besoin de leurs propres organes, mais aussi d’un programme politique qui permette l’accomplissement du processus révolutionnaire avec la destruction du capitalisme et la construction d’une société socialiste. C’est ce que défend Socialismo Revolutionario, notre organisation-soeur au Vénézuela.

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