Depuis des années, les pompiers revendiquent les mêmes choses, sans que leur sort ne soit pour autant amélioré. Que se soit au niveau fédéral ou au niveau des communes, les pompiers ont beaucoup à exiger pour pouvoir faire efficacement leur travail : protéger nos vies.
Faites l’expérience autour de vous, demandez à quel métier on pense quand on parle de métier à risque. Nombreux sont ceux qui vous répondront « pompier ». Mais pas le gouvernement, pour qui les hommes du feu ne font pas un métier « à risque » ! Cette situation est d’autant plus ridicule qu’une récente étude a fait ressortir que les pompiers, en plus des dangers évidents d’un incendie par exemple, sont bien plus exposés à quatre types de cancers en raison des produits chimiques auxquels ils sont confrontés durant leur travail (gaz d’échappements, suies, benzène,…).
Autre revendication pour le fédéral, l’accès à la pension dès 56 ans. Mais là encore, il y a blocage, surtout depuis que le soi-disant Pacte de Solidarité entre les Générations est passé fin 2005.
Ces deux demandes valent déjà à elles seules de rentrer en lutte, mais les conditions de travail des pompiers sont encore empirées par la situation au sein de leur Intercommunale (Intercommunale d’Incendie de Liège et Environs, IILE).
C’est tout d’abord l’ambiance de travail que citent les pompiers. Le manque de communication et de respect caractérise la direction. Nominations et promotions, par exemple, connaissent des conditions assez obscures aux yeux des travailleurs. Il y a aussi les bâtiments dans lesquels travaillent les pompiers 24h/24, dans un état déplorable au contraire des locaux de la direction, qui n’y passe, elle, que 8 heures par jour. « Et encore… » nous dit avec humour un travailleur. Deux mots qui en disent beaucoup sur les rapports qu’entretient la direction avec « son » personnel…
La direction roule en voitures de fonction, de grosses BM, sans en avoir l’utilité, et bénéficie de cartes de crédits et d’autres avantages, alors que les 500 pompiers liégeois sont en sous-effectif d’au moins 30 hommes. Voilà un danger supplémentaire qui pourrait être évité en utilisant mieux l’argent disponible.
Comme cité plus haut, les travailleurs du feu demandent la reconnaissance de leur métier comme étant « à risque ». Mais tous ne sont pas exposés aux mêmes dangers. Les « plongeurs » ou le GRIMP (Groupe d’Intervention en Milieu Périlleux) effectuent, selon la direction, le même travail que les autres ! Le GRIMP, pourtant, se distingue déjà dans les entraînements, qui se font parfois à 50 ou 60 mètres de hauteur sur des grues, des clochers,… Ils doivent de plus recevoir des formations en dehors des heurs de travail, qui ne sont bien entendu pas payées par leur patron, l’Intercommunale!
Les pompiers demandent aussi une revalorisation de leur salaire de l’ordre de 5%. Augmentation salariale, plus de clarté dans les nominations et promotions, plus de moyens et d’effectifs, reconnaissance du caractère « à risque » de leur métier,… Les pompiers ne demandent finalement rien d’extraordinaire, ils demandent à pouvoir assurer au mieux la vie de la population. Et pourtant…
Et pourtant, beaucoup de blabla et rien de concret. Face à cette situation, les travailleurs sont ainsi donc rentrés en action, tout en assurant le service. Ce sont donc des pompiers en congé qui ont commencé la tournée des communes dépendant de leur Intercommunale, à commencer par celle de Beyne-Heusay dont le bourgmestre est président de l’IILE. Ainsi, en quelques jours, le centre-ville, Visé, Saint-Georges, Grâce-Hollogne, Ans, Herstal ont connu la même visite et le même arrosage des façades. Rien de dégradant, donc, mais plutôt d’impressionnant, d’autant plus que les arrosages, la mousse et la fumée étaient accompagnés des sirènes des véhicules qui attiraient les habitants du quartier. A ce titre, les pompiers ont fait un effort particulier pour informer la population de la teneur de leurs actions, notamment en organisant au centre-ville un barbecue géant et une soupe populaire.
Ils se sont également rendus ce 5 février devant les bâtiments liégeois de la RTBF et de RTL. Les médias traditionnels furent enfumé et chahuté en signe de protestation contre la manière dont ils retransmettent leur lutte. « On a quasi 10 minutes sur une école qui a un nouveau toit, mais rien sur les problèmes sociaux » nous dit un pompier, un travailleur en lutte face au black-out médiatique.
Pour Alain Charlier, délégué des pompiers de Liège, la réussite des actions (une centaine de participants à chaque fois, alors qu’ils devaient être en congé) tient à un travail de sensibilisation à l’intérieur de la caserne, mais aussi à une longue histoire de ras-le-bol. Et en effet, il ne faut pas remonter loin pour trouver des traces de lutte des pompiers. En décembre dernier, ils avaient déjà mené des actions contre l’assureur Ethias qui refusait de couvrir les accidents de travail. A ce moment déjà, on parlait aussi du manque de considération de la direction pour les travailleurs et du salaire sans rapport avec les risques quotidiens du métier de pompier.
Alain Charlier remarque aussi qu’avant leurs actions, rien n’était possible. Mais après avoir visité quelques communes, 6 euros de chèques repas par garde prestée ont tout de même été trouvé. Alors que les politiques disaient être arrivés à un maximum, l’argent arrive quand on lutte un peu.
Cette situation de sous-financement est commune à l’ensemble des services publics. Il est facile aux politiciens de répondre qu’il manque de l’argent pour concrétiser les revendications légitimes des travailleurs, mais ce sont pourtant eux qui ont organisé (et organisent encore) la privatisation des services publics tout en vidant les caisses de l’Etat à force d’offrir des cadeaux fiscaux au patronat « pour sauvegarder l’emploi ». L’exemple de VW nous a récemment démontré à quel point cela était utile…
Ce dont nous avons besoin, c’est d’une autre politique, une politique qui mette au centre de son action les intérêts des travailleurs et de leurs familles et non ceux des actionnaires et des patrons.